dimanche 6 juillet 2025

Le Pèlerin, semaine 4, mercredi, chapitre 13

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 13

SEMAINE 4 - MERCREDI

Lire et prier : « Détourne mes yeux de la vanité,
et fais-moi vivre dans ta voie » (Psaume 119:37)

Pèlerins à la Foire de la Vanité

L'Évangéliste sort de nouveau à la rencontre des pèlerins et les prépare à de nouveaux combats. Ils entrent dans la Foire de la Vanité, où ils sont raillés. Persécution et mort de Fidèle

À peine nos pèlerins avaient-ils quitté ce désert que Fidèle aperçut derrière lui une personne qu’il reconnut aussitôt, et s’exclama en s’adressant à son compagnon : Regarde qui vient là.

Chrétien regarda et dit : C’est mon bon ami l’Évangéliste ! Oui —répondit Fidèle—, le mien aussi, car c’est lui qui m’a guidé jusqu’à la porte.

À ce moment-là, l’Évangéliste s’approcha d’eux et les salua en disant :

Évangéliste – Paix à vous, très chers, ainsi qu’à ceux qui vous assistent.

Chrétien – Sois mille fois le bienvenu, mon bon Évangéliste ! Ta présence me rappelle ta bonté passée et tes efforts inlassables pour mon bien éternel.

Fidèle – Oui, sois mille fois le bienvenu, doux Évangéliste : que ta compagnie est désirée par ces pauvres pèlerins !

Évangéliste – Comment avez-vous été, mes amis, depuis la dernière fois que nous nous sommes séparés ? Qu’avez-vous rencontré et comment vous êtes-vous comportés ?

Ils lui racontèrent alors tout ce qui leur était arrivé en chemin, et comment, malgré les nombreuses difficultés, ils étaient arrivés à l’endroit où ils se trouvaient.

— Je me réjouis beaucoup —dit l’Évangéliste—, non que vous ayez dû passer par tant d’épreuves, mais parce que vous en êtes sortis vainqueurs, et que, malgré vos nombreuses faiblesses, vous avez persévéré dans ce chemin jusqu’à présent. Je me réjouis autant pour vous que pour moi. J’ai semé, et vous avez récolté, et le jour viendra où celui qui sème et celui qui moissonne se réjouiront ensemble (Jean 4:36), c’est-à-dire, si vous demeurez fermes, car vous moissonnerez en son temps si vous ne vous relâchez pas (Galates 6:9).

Devant vous se trouve la couronne incorruptible ; courez de manière à la remporter (1 Corinthiens 9:24-27). Certains se mettent en route pour obtenir cette couronne, mais après avoir bien progressé, un autre vient la leur ravir. Tenez donc ferme ce que vous avez, afin que personne ne prenne votre couronne. Vous n’êtes pas encore hors d’atteinte de Satan, vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang en luttant contre le péché (Apocalypse 3:2 ; Hébreux 12:4).

Ayez toujours le royaume devant vos yeux et croyez fermement aux choses invisibles. Ne laissez pas les choses du monde envahir votre cœur, et veillez surtout sur vos cœurs et leurs convoitises, car ils sont trompeurs par-dessus tout, et incurablement mauvais. Vous avez à vos côtés tout le pouvoir qui est dans les cieux et sur la terre.

Chrétien le remercia pour cette exhortation et lui demanda de les instruire encore davantage, afin de les aider à achever leur chemin. D’autant plus qu’ils savaient qu’il était prophète et qu’il pouvait leur dire ce qui allait leur arriver, et comment y faire face avec persévérance. Fidèle appuya la demande de Chrétien, et l’Évangéliste reprit la parole.

Évangéliste – Mes enfants, vous avez entendu, dans la parole de vérité de l’Évangile, que c’est à travers beaucoup de tribulations que nous entrons dans le royaume de Dieu, et que dans chaque ville nous attendent chaînes et persécutions. Vous devez donc vous attendre à ce que certaines de ces choses se présentent sur votre chemin. Une partie de ce témoignage vous l’avez déjà expérimentée, et le reste ne tardera pas à venir, car, comme vous le voyez, vous êtes presque sortis de ce désert, et vous arriverez bientôt dans une ville où vous serez attaqués par des ennemis qui chercheront à vous tuer.

Sachez que l’un de vous, ou les deux, devra sceller son témoignage de son propre sang. Soyez fidèles jusqu’à la mort, et le Roi vous donnera la couronne de vie. Celui qui mourra là, bien que sa mort soit honteuse et ses souffrances atroces, aura une meilleure part que son compagnon, non seulement parce qu’il parviendra plus vite à la Cité Céleste, mais aussi parce qu’il sera délivré de nombreuses misères que l’autre devra encore affronter sur le reste de sa route. Quand vous arriverez dans la ville proche, et que ce que je vous ai annoncé s’accomplira, souvenez-vous de votre bon ami. Conduisez-vous avec courage et remettez vos âmes à Dieu (1 Pierre 4:19).

Je vis alors, dans mon songe, qu’aussitôt sortis du désert, ils aperçurent un village appelé Vanité, dans lequel se tient une foire, portant le même nom, qui dure toute l’année. Et il en est ainsi parce que la ville où elle a lieu est plus vaine que la vanité elle-même, et parce que tout ce qui s’y vend, et tous ceux qui s’y trouvent, ne sont que vanité, car, comme l’a dit le sage : tout est vanité (Ecclésiaste 12:8 ; Ésaïe 13:11). Cette foire est très ancienne. Voici son origine :

Il y a près de cinq mille ans, des pèlerins, comme Chrétien et Fidèle, se rendaient déjà à la Cité Céleste. Voyant cela, Bélial, Apollyon et Légion, avec leurs compagnons, sachant que les pèlerins devaient nécessairement passer par cette ville de Vanité, convinrent d’y établir une foire permanente où se vendrait toute espèce de vanité.

C’est pourquoi on y trouve toutes sortes de marchandises : maisons, terres, affaires, emplois, honneurs, titres, pays, royaumes, convoitises, plaisirs ; et toute sorte de délices comme : prostituées, épouses, maris, enfants, maîtres, serviteurs, vie, sang, corps, âme, argent, or, perles, pierres précieuses, et bien d’autres choses encore.

On y trouve aussi constamment des tromperies, des jeux, des divertissements, des bouffons [clowns], des théâtres, des amusements et des escrocs de toute sorte. Et ce n’est pas tout. On y trouve aussi gratuitement : vols, meurtres, adultères, parjures, faux témoignages de toute gravité. Comme dans d’autres foires moins importantes, celle-ci comporte plusieurs rues et passages, tous dédiés à certaines spécialités.

Certaines de ces rues portent les noms de pays : rue d’Espagne, d’Italie, de France, d’Angleterre, d’Allemagne, etc. Comme dans toutes les autres foires, il y a ici des marchandises plus prisées : ce sont celles de Rome, à laquelle s’opposent aujourd’hui l’Angleterre et d’autres nations qui n’approuvent pas le développement commercial de Rome. Le chemin qui mène à la Cité Céleste passe en plein milieu de ce village, et celui qui veut y aller sans passer par là doit sortir du monde (1 Corinthiens 5:10).

Même le Prince des princes, lorsqu’il était dans le monde, dut passer par ce village avant d’arriver dans son pays ; il fut aussi conduit à cette foire qui appartenait, je crois, à Bélial, lequel l’invita personnellement à acheter ses vanités ; et non seulement cela, il lui offrit tout gratuitement, à condition qu’il consente à s’incliner devant lui en traversant le village.

Comme c’était une personne de haut rang, Bélial le conduisit dans d’autres rues et lui montra tous les royaumes du monde en un instant, essayant de le persuader d’acheter quelque vanité ; mais il n’y parvint pas, et le Prince quitta la ville sans avoir dépensé un seul sou (Matthieu 4:8-10). Cette foire est donc très ancienne et d’une grande importance.

Il était nécessaire que les pèlerins passent par ce lieu, et ainsi il en fut ; mais dès que leur présence fut remarquée, tout le peuple du village fut en émoi à cause d’eux. Voici pourquoi :

1º) Les vêtements des pèlerins étaient très différents de ceux que l’on vendait à la foire, et les gens les entouraient de toutes parts pour les voir. Certains disaient qu’ils étaient fous, d’autres qu’ils étaient insensés, et d’autres encore qu’ils étaient étrangers (Job 12:4 ; 1 Corinthiens 4:9).

2º) Et si beaucoup s’étonnaient de leurs vêtements, ils étaient tout autant surpris de leur manière de parler, car peu pouvaient les comprendre. Ils parlaient la langue de Canaan et les gens de la foire parlaient la langue du monde ; ainsi, ils se prenaient mutuellement pour des barbares (1 Corinthiens 2:7-8).

3º) Mais ce qui étonnait le plus les marchands, c’était que ces pèlerins ne faisaient aucun cas de leurs marchandises, et ne prenaient même pas la peine de les regarder. Et si quelqu’un les appelait à acheter, ils se bouchaient les oreilles et s’écriaient : « Détourne mes yeux de la vanité » (Psaume 119:37). Et ils levaient les yeux vers le ciel, comme pour indiquer que leurs affaires étaient là-haut (Philippiens 3:20-21).


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Le Pèlerin, semaine 4, mardi, chapitre 12

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 12
SEMAINE 4 - MARDI

Lire et prier : « Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je suis un airain qui résonne ou une cymbale qui retentit. » (1 Co 13:1)


Chrétien et Fidèle rencontrent Loquace (2)

Fidèle – Eh bien, frère, je dois accorder foi à tes paroles, non seulement parce que tu m’as assuré que tu le connais, mais aussi parce qu’en tant que chrétien, tu dois rendre un témoignage véritable sur les hommes ; car je ne peux supposer que tu dises cela par haine ou mauvaise volonté.

Chrétien – Si je ne le connaissais pas, il serait naturel que j’en pense la même chose que toi ; et si j’avais entendu un ennemi de la religion dire ce que je viens de te rapporter à son sujet, j’aurais certainement cru que ce n’était que calomnie, car c’est ce que l’on entend ordinairement dans la bouche des méchants lorsqu’ils parlent des bons. Mais tout ce que je t’ai dit, et bien plus encore que je sais, je peux le prouver clairement. D’ailleurs, les gens pieux ont honte de lui : ils ne veulent pas de lui comme frère ou ami, et rien que de le nommer suffit à faire froncer le sourcil \[sourcil] de ceux qui le connaissent.

Fidèle – Bien. Je comprends maintenant la différence qu’il y a entre dire et faire, et je garderai toujours cela à l’esprit dorénavant.

Chrétien – En effet, ces choses sont aussi différentes que l’âme et le corps : car de même que le corps sans l’âme n’est qu’un cadavre, l’âme de la religion est la partie pratique. « La religion pure et sans tache devant Dieu notre Père consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions, et à se préserver de la corruption du monde. » (Jacques 1:27). Loquace ne comprend pas cela ; il pense qu’écouter et parler suffisent à faire un bon chrétien ; ainsi, il égare sa propre âme.

Écouter n’est que semer la parole, et parler ne suffit pas à montrer qu’il y a vraiment du fruit dans le cœur et dans la vie. Et nous devons être bien sûrs que, au jour du jugement, tous seront jugés selon les fruits qu’ils auront produits (Matthieu 25:31-46). On ne leur demandera pas : As-tu cru ? Mais : As-tu pratiqué ? Et c’est selon cela que se fera le jugement. C’est pourquoi la fin du monde est comparée à la moisson du champ (Matthieu 13:18-23). Et tu sais bien que le moissonneur ne s’intéresse qu’aux fruits. Je ne dis pas par là qu’on puisse alors accepter quoi que ce soit qui ne soit pas de la foi, mais je veux te montrer combien auront peu de valeur en ce jour-là les professions et les protestations de Loquace.

Fidèle – Cela me rappelle les paroles par lesquelles Moïse décrit l’animal pur (Lévitique 11 ; Deutéronome 14). Celui qui a l’ongle fendu et qui rumine ; une seule de ces qualités ne suffit pas pour le classer comme pur. Le lièvre rumine, mais il est impur parce qu’il n’a pas l’ongle fendu. Ainsi en est-il de Loquace : il rumine, il cherche la connaissance, il médite la parole, mais il n’a pas l’ongle fendu ; il ne se détourne pas du chemin des pécheurs ; mais, à l’image du lièvre, il a des pattes de chien ou d’ours, donc il est impur.

Chrétien – À mon avis, tu as donné à ces textes le vrai sens évangélique, et j’ajouterai une autre pensée. Paul appelle les grands bavards « un airain qui résonne et une cymbale qui retentit » (1 Corinthiens 13:1), ou, ailleurs, « des choses inanimées qui rendent un son » (1 Corinthiens 14:7). Des choses sans vie, c’est-à-dire sans la véritable grâce de l’Évangile, qui par conséquent ne pourront jamais avoir de place dans le royaume des cieux, parmi les enfants de la vie, même si leur voix semble celle des anges.

Fidèle – Voilà pourquoi sa compagnie me plaisait beaucoup au début, et maintenant elle m’est déjà pénible. Comment allons-nous nous débarrasser de lui ?

Chrétien – Suis mes conseils, et si tu fais ce que je dis, il se lassera aussi de marcher à tes côtés, à moins que Dieu ne touche son cœur et ne le convertisse.

Fidèle – Que dois-je faire ?

Chrétien – Écoute : approche-toi de lui, et parle-lui sérieusement de la puissance de la religion¹. Lorsqu’il aura approuvé tes paroles, ce qu’il ne manquera pas de faire, demande-lui directement si c’est ce qu’il pratique dans son cœur, dans sa maison et dans sa vie.

Alors, Fidèle s’approcha de nouveau de Loquace et lui demanda : – Eh bien, comment vas-tu maintenant ?

Loquace – Je vais bien ; mais je pensais que nous allions davantage converser.

Fidèle – Nous allons converser maintenant. Et puisque tu m’as laissé le choix du sujet, je propose celui-ci : Comment se manifeste la grâce salvatrice de Dieu, et à quel moment existe-t-elle dans le cœur de l’homme ?

Loquace – Tu veux dire que nous allons parler de la puissance des choses spirituelles. Le sujet est excellent, et je suis prêt à te répondre dès maintenant.

1º) Lorsque la grâce de Dieu existe dans le cœur, elle provoque un grand cri contre le péché ; 2º) …

Fidèle – Plus lentement. Considérons chaque chose de per se \[séparément]. Il me semble que tu t’exprimes plus justement en disant qu’elle se manifeste par l’inclination de l’âme à haïr le péché.

Loquace – Et alors ? Quelle différence y a-t-il entre crier contre le péché et le haïr ?

Fidèle – Une très grande. On peut, par décence, crier contre le péché sans le haïr. J’ai entendu bien des gens crier contre le péché, même depuis la chaire, et pourtant ils le tolèrent très bien dans leur cœur, leur maison et leur vie. La femme de Potiphar cria à haute voix avec grande force, comme si elle était très chaste (Genèse 39:15), et pourtant, c’est elle qui avait provoqué le péché, et elle aurait bien voulu le commettre. Les cris de certaines personnes contre le péché sont comme ceux d’une mère envers l’enfant qu’elle réprimande, mais qu’elle embrasse et caresse aussitôt après.

Loquace – Il me semble que tu veux me prendre à mes propres paroles ?

Fidèle – Non. Je veux seulement remettre les choses à leur juste place. Dites maintenant quel est le deuxième point par lequel vous démontrez l’existence de l’œuvre de la grâce dans le cœur.

Loquace – Une grande connaissance des mystères évangéliques.

Fidèle – Vous devriez mettre celui-là en premier, mais, que ce soit en premier ou en second, c’est toujours faux, car nous pouvons facilement acquérir beaucoup de connaissances évangéliques sans avoir l’œuvre de la grâce dans nos âmes. De plus, un homme peut posséder toute la science et malgré cela n’être rien, et donc ne pas être enfant de Dieu (1 Corinthiens 13:2).



___________________ 

¹ Il faut garder à l’esprit que le mot « religion » utilisé dans ce livre se réfère à la vie chrétienne authentique, et non à un système organisé de foi personnelle ou collective comme le catholicisme ou le protestantisme, qui sont des religions institutionnalisées. Une telle religion n’a aucun pouvoir, car chacun peut choisir d’en faire partie ou non, sans nécessairement expérimenter un changement de vie. Dans le cas de la vie chrétienne, cela n’est pas possible, car être chrétien implique une transformation, laquelle ne peut être trouvée que chez ceux qui sont membres du Corps de Christ et en Christ.


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Le Pèlerin, semaine 4, lundi, chapitre 12

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN

VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 12

SEMAINE 4 - LUNDI

Lire et prier : « Trop parler ne manque pas de transgression, mais celui qui retient ses lèvres est un homme prudent. » (Pr 10.19)


Chrétien rencontre Loquace

En Loquace se présente le vrai portrait de nombreux faux docteurs de la Religion, qui la réduisent à beaucoup de paroles et aucune œuvre.

Les deux pèlerins étaient plongés dans cette importante conversation, quand je vis en songe que Fidèle, regardant sur le côté du chemin, aperçut un homme appelé Loquace, qui marchait un peu à l’écart d’eux, car le chemin était si large qu’il y avait de la place pour tous. C’était un homme grand, mieux vu de loin que de près. Fidèle l’appela, lui demandant s’il se dirigeait vers le Pays Céleste.

Loquace – Exactement. C’est bien là que je me rends.

Fidèle – Nous aussi. Et si vous voulez venir avec nous, nous profiterons de votre agréable compagnie.

Loquace – Je vous accompagnerai très volontiers.

Fidèle – Marchons donc ensemble, et mettons à profit notre temps par des conversations édifiantes.

Loquace – Tout ce qui est conversations utiles me plaît beaucoup, et je me félicite sincèrement d’avoir trouvé des personnes qui se consacrent à une si bonne œuvre, car en vérité, rares sont ceux qui emploient leur temps ainsi en voyageant ; la plupart préfèrent parler de choses frivoles, ce qui me chagrine toujours beaucoup.

Fidèle – C’est vraiment bien triste, car rien n’est plus digne de notre conversation que les choses qui appartiennent à Dieu et au ciel.

Loquace – Comme j’aime vous entendre parler ainsi ! Car vos paroles révèlent une profonde conviction. Y a-t-il quelque chose de comparable au plaisir et au profit qu’on tire de parler des choses de Dieu ? Si l’on aime les choses merveilleuses, telles que l’histoire, les mystères, les miracles, les prodiges et les signes, où trouvera-t-on une lecture aussi agréable, et écrite d’une manière si douce, que dans les Saintes Écritures ?

Fidèle – C’est vrai, mais nous devons toujours tirer profit de notre conversation.

Loquace – Je suis bien d’accord. Parler de ces choses est très profitable, car cela permet de parvenir à la connaissance de bien d’autres, telles que la vanité des choses du monde et l’utilité des choses célestes. Voilà pour le général ; et si l’on descend dans les détails, on peut apprendre la nécessité d’une nouvelle naissance, l’insuffisance de nos œuvres, le besoin que nous avons de la Justice du Christ, etc.

Dans cette conversation, on peut aussi apprendre ce que sont la repentance, la foi, la prière, la souffrance, et autres choses semblables. Nous pouvons également connaître les grandes promesses et consolations de l’Évangile, pour notre propre bien ; et enfin, apprendre comment réfuter les fausses opinions, défendre la vérité et enseigner les ignorants.

Fidèle – Tout cela est très vrai, et je me réjouis beaucoup de vous entendre parler ainsi.

Loquace – Le manque de ces pratiques explique pourquoi si peu comprennent le besoin de la foi et de l’œuvre de la grâce dans leur âme pour obtenir la vie éternelle ; et pourquoi tant vivent, par ignorance, sous les œuvres de la loi, par lesquelles l’homme ne peut en aucune manière entrer dans le royaume des cieux.

Fidèle – Permettez-moi de vous dire que la connaissance spirituelle de ces choses me semble être un don de Dieu. Personne ne les obtient simplement en en parlant ou par des efforts humains.

Loquace – Je le sais parfaitement, car rien ne nous est donné si ce n’est d’en haut. Tout est par la grâce, rien par les œuvres, des centaines de versets le confirment.

Fidèle – Très bien. Limitons à présent notre conversation à un sujet particulier.

Loquace – Quel sujet choisissez-vous ? Voulez-vous que je vous parle de choses terrestres ou célestes ? Morales ou évangéliques ? Sacrées ou profanes ? Passées ou futures ? Étrangères ou locales ? Essentielles ou secondaires ? Choisissez, et je parlerai de ce que vous voudrez, à condition qu’on en retire un profit.

Fidèle – (Étonné et s’approchant de Chrétien, qui jusque-là était resté un peu en retrait) : Quel bon compagnon nous avons trouvé ; ce doit être un excellent pèlerin !

Chrétien – (Souriant modestement) – Cet homme, que tu trouves si aimable, est capable de tromper vingt personnes qui ne le connaissent pas.

Fidèle – Et tu le connais ?

Chrétien – Le connaître ? Je le connais mieux que lui-même.

Fidèle – Alors, qui est-ce ?

Chrétien – Il s’appelle Loquace, et il vit dans la ville où nous sommes nés ; je suis surpris que tu ne le connaisses pas.

Fidèle – De qui est-il le fils ? Où habite-t-il ?

Chrétien – C’est le fils d’un certain Bien Parlant, qui vivait dans la rue des Belles Paroles ; mais malgré sa langue d’argent, c’est un homme plutôt quelconque.

Fidèle – Pourtant, il semble être un homme très respectable.

Chrétien – Oui, pour qui ne le connaît pas ; il paraît meilleur en voyage ; chez lui, c’est une toute autre histoire. Quand tu as dit qu’il semblait être un homme convenable, je me suis souvenu de certains tableaux de peintres, qui font plus bel effet de loin que de près.

Fidèle – Je ne sais si je dois prendre tes paroles comme une plaisanterie, car je te vois sourire.

Chrétien – Que Dieu me garde de plaisanter sur ce sujet, bien que j’aie souri ; et que le Seigneur ne permette pas que j’accuse qui que ce soit à tort. Je vais maintenant te dire ce que je sais de cet homme. Toutes les compagnies lui conviennent ; toutes les conversations lui plaisent ; ce qu’il t’a dit tout à l’heure, il le répétera dans une taverne. Plus il boit, plus il parle de ces choses. La vraie religion n’est ni dans son cœur, ni dans sa maison, ni dans sa vie ; tout ce qu’il a est sur le bout de sa langue, et sa religion consiste à proclamer qu’il en a une.

Fidèle – Tu parles sérieusement ? Je me suis donc bien trompé sur ce personnage !

Chrétien – Je parle sérieusement. Tu peux me croire : tu te trompes beaucoup sur lui. Souviens-toi du proverbe : « Ils disent et ne font pas », car le royaume de Dieu ne consiste pas en paroles, mais en puissance (Matthieu 23.3 ; 1 Corinthiens 4.20). Il parle de prière, de repentance, de foi, de nouvelle naissance, mais il ne ressent rien de tout cela ; il ne fait que parler. Je l’ai observé et étudié de près, chez lui comme ailleurs, et je sais que ce que je dis est la pure vérité. Sa maison est aussi dépourvue de religion que le blanc d’œuf est sans saveur.

Il n’y a ni prière ni le moindre signe de repentance du péché ; les bêtes, à leur manière, servent Dieu mieux que lui. De plus, il est une vraie tache \[réputation], un opprobre et une honte pour la religion, aux yeux de tous ceux qui le connaissent (Romains 2.23-24). Dans son quartier, on n’entend presque jamais un mot favorable à la religion, et c’est à cause de lui : les gens disent habituellement qu’il est un saint dehors et un démon chez lui. Sa propre famille le connaît bien, car il est si grossier et colérique avec tous qu’ils ne savent comment lui plaire, ni comment lui parler.

Ceux qui ont des affaires avec lui disent sans détour qu’ils préfèrent traiter avec un mahométan, car ils sont certains de trouver plus d’honnêteté chez un disciple de Mafoma¹. Ce n’est que lorsqu’il ne le peut pas qu’il s’abstient de tromper, de frauder et d’abuser ceux avec qui il traite ; le pire, c’est que s’il découvre chez l’un d’eux une crainte ignorante (ainsi appelle-t-il les premiers signes de sensibilité de la conscience), il l’appelle sot, imbécile et stupide, à n’en plus finir, refuse de l’employer à quelque tâche que ce soit, et ne veut même pas le recommander à personne.

Quant à moi, je suis convaincu que sa vie scandaleuse a déjà causé la chute de beaucoup, et, si Dieu ne l’arrête pas, ce sera la ruine de bien d’autres.


_____________________

¹ Mafoma est une forme archaïque et portugaise de désigner Mahomet, le prophète fondateur de l'islam. Ce terme a été utilisé au Moyen Âge et dans des textes anciens, souvent avec une connotation péjorative ou déformée, surtout dans les contextes chrétiens. Aujourd'hui, l’usage de « Mafoma » est considéré comme obsolète et irrespectueux — le nom correct et respectueux est Mahomet en français, ou Muhammad en arabe.


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samedi 5 juillet 2025

Le Pèlerin, semaine 4, dimanche, chapitre 11

Le PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
À LA CITE CÉLESTE

CHAPITRE 11

SEMAINE 4 - DIMANCHE

Lire et prier : « Oui, je juge que tout est une perte, à cause de la sublimité de la connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur ; à cause de lui, j’ai tout perdu et je considère tout comme des déchets, afin de gagner Christ » (Philippiens 3:8)


Chrétien trouve en Fidèle un excellent compagnon (3)

Chrétien - Très bien ; et que lui as-tu répondu ?

Fidèle - Je lui ai dit que, bien qu’ils soient mes parents selon la chair, tous ceux que je venais de nommer, il n’en restait pas moins vrai que, depuis le moment où je suis entré dans ce chemin, ils avaient renoncé à cette parenté et que je leur rendais la pareille, de sorte qu’à présent, il n’y a aucun lien entre nous.

De plus, je lui ai dit que, en ce qui concerne la vallée, il agissait dans une complète erreur, car l’humanité précède la gloire, l’esprit s’élève avant la chute, raison pour laquelle je préférais traverser cette vallée à l’honneur que les plus sages convoitaient, plutôt que d’opter pour ce qu’il jugeait digne de nos affections.

Chrétien - Et tu n’as trouvé personne d’autre ?

Fidèle - J’ai trouvé un certain Pejo. De tous ceux que j’ai rencontrés dans ma pèlerinage, c’est celui qui me paraît avoir le nom le moins approprié. Les autres cédaient après quelque argumentation, mais cet insolent ne se taisait pas.

Chrétien - Alors, que t’a-t-il dit ?

Fidèle - Eh bien ! Que m’a-t-il dit ? Même la religion elle-même soulevait des objections. Il disait qu’il était servile et misérable pour un homme de s’occuper de telles idées ; que le scrupule [préoccupation morale] de la conscience était une lâcheté ; que ce serait ridicule d’avilir [s’humilier] l’homme au point de mesurer ses paroles, en renonçant [abandonnant] à la fière liberté qui est l’apanage [qualité] des esprits forts de notre temps.

Il objecta [dissensa] aussi que seul un nombre limité des puissants, des riches et des sages avait suivi mon opinion, en tous temps, et qu’aucun d’eux ne l’avait fait que lorsqu’il était devenu sot [fou] et qu’il s’était laissé convaincre de la nécessité de risquer volontairement la perte de tout pour une chose que personne ne sait ce que c’est (1 Cor. 1:26 ; 3:18 ; Phil. 3:7-9 ; Jean 7:48).

Considérez la condition basse et servile de la majorité des pèlerins de notre époque, ajouta-t-il, ainsi que leur ignorance, leur manque de civilisation et de connaissance des sciences naturelles. Sur ce sujet, il discuta longuement, ainsi que sur bien d’autres points similaires, tels que : il est honteux de gémir et pleurer en écoutant un sermon, de rentrer chez soi le visage triste, de demander pardon au prochain pour les offenses les plus légères, et de restituer ce qui a été volé.

Il me dit aussi que la religion fait que l’homme renonce aux grands et aux puissants, parce que ceux-ci ont quelques petits vices (qu’il nommait beaucoup plus doucement), et qu’il reconnaisse et respecte les misérables comme ses frères. N’est-ce pas une honte ? s’exclama-t-il enfin.

Chrétien - Et toi, que lui as-tu répondu ?

Fidèle - Je confesse qu’au début, je ne savais pas quoi lui dire, car il m’a dit tant de choses que mes joues se sont empourprées [rougissement]. Le même Pejo a failli me vaincre. Mais ensuite, j’ai commencé à penser que ce que les hommes considèrent comme sublime est une abomination devant Dieu (Luc 16:15) ; que ce Pejo me dit ce que sont les hommes, mais pas ce qu’est Dieu, ni sa parole, ni ses pensées, et qu’au jour du jugement, nous ne serons pas jugés selon les esprits orgueilleux du monde, mais selon la sagesse et la loi du Très-Haut.

Donc, j’ai pensé que la meilleure chose est sûrement ce que Dieu dit, même si cela s’oppose à tous les hommes du monde. Je vois que Dieu préfère sa religion à une conscience délicate ; que les plus acceptés sont ceux qui, pour le royaume des cieux, se font fous ; et qu’un pauvre qui aime Christ est plus riche que le plus riche du monde, si ce dernier le hait.

Éloigne-toi donc de moi, Pejo ! Ennemi de mon salut ! Dois-je t’écouter au détriment [préjudice] de mon Seigneur, de mon Souverain ? Si je faisais cela, comment pourrais-je le regarder en face au jour de sa venue ? (Marc 8:38). Si je rougissais maintenant de ses chemins et de ses serviteurs, comment pourrais-je espérer sa bénédiction ?

Ce Pejo était vraiment un individu très audacieux. J’ai eu du mal à le faire partir, mais même après, il m’angoissait [tourmentait] par des rencontres répétées, me chuchotant à l’oreille telle ou telle faiblesse dans laquelle tombent ceux qui suivent la religion ; mais enfin, je lui fis comprendre qu’il perdait misérablement son temps, car c’est dans les choses qu’il méprisait que je voyais précisément la plus grande gloire.

Ce n’est qu’ainsi que j’ai pu me débarrasser de ses importunités, et, me déchargeant alors à haute voix, je m’exclamai : Beaucoup de tentations rencontrent ceux qui obéissent à la voix du ciel, et toutes selon les inclinations de la chair : quand les unes sont vaincues, d’autres nous assaillent. Vigilance, pèlerins, comportez-vous toujours vaillamment !

Chrétien - J’estime beaucoup, frère, que tu aies affronté avec tant de courage cet infâme, à qui, comme tu lui as dit judicieusement [prudemment], le nom qu’il porte va si mal. C’est un insolent qui nous poursuit même dans les rues, cherchant à nous faire honte du bien. Mais si son audace n’était pas si grande, comment ferait-il ce qu’il fait ? Nous lui résistons parce que, malgré ses prétentions, il n’atteint ses fins qu’avec les insensés, et avec personne d’autre. Salomon a dit : « Les sages posséderont la gloire, l’exaltation des insensés sera leur ignominie » (Prov. 3:35).

Fidèle - Il m’a semblé très nécessaire de demander à Celui qui veut que nous soyons vaillants pour la vérité sur la terre, qu’il nous protège contre Pejo.

Chrétien - Tu as raison. Et tu n’as trouvé personne d’autre dans la vallée ?

Fidèle - Non, car le soleil m’a éclairé pendant le reste du chemin, ainsi que dans la vallée de l’Ombre de la Mort.

Chrétien - Tu as eu de la chance ; il ne m’est pas arrivé la même chose. Dès l’entrée de la vallée, j’ai dû soutenir un combat terrible et prolongé avec le malin Apollyon. J’ai cru qu’il me tuerait, surtout quand il m’a piétiné comme s’il voulait m’écraser. Quand il m’a jeté à terre, mon épée est tombée de ma main, et je l’ai entendu s’écrier : Maintenant tu ne m’échapperas pas ! Mais j’ai crié vers le Seigneur, et Lui, m’entendant, a mis fin à toutes mes angoisses.

Puis je suis passé à la Vallée de l’Ombre de la Mort, et presque la moitié du chemin j’ai dû avancer dans le noir, car il faisait déjà nuit. Il m’a souvent semblé que j’allais mourir, mais finalement le jour s’est levé, le soleil s’est levé, et ainsi j’ai pu continuer le chemin avec bien plus de calme et de facilité.


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vendredi 4 juillet 2025

Le Pèlerin, semaine 3, samedi, chapitre 11

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 11

SEMAINE 3 - SAMEDI

Lire et prier : «J’ai fait un pacte avec mes yeux; comment donc les
arrêterais-je sur une vierge ?»
(Job 31:1)


Chrétien trouve en Fidèle un excellent compagnon (2)


Fidèle – En vérité, je ne sais pas si je me suis absolument délivré d’elle.

Chrétien – Mais, certes, tu n’as pas accédé \[consenti] à ses désirs ?

Fidèle – Non, je ne voulais pas me souiller, car j’avais à l’esprit le vieux dicton : «Ses pieds descendent vers la mort» (Prov. 5:5). Ainsi, j’ai fermé les yeux pour ne pas être ensorcelé par ses regards (Job 31:1). Elle m’a alors beaucoup injurié, et j’ai poursuivi ma route.

Chrétien – N’as-tu rencontré aucun autre obstacle ?

Fidèle – Quand je suis arrivé au pied du Défilé de la Difficulté, j’ai rencontré un homme très âgé, qui m’a demandé comment je m’appelais et où j’allais. Je lui ai répondu. Et il a ajouté : Tu me sembles être un bon garçon. Veux-tu être à mon service, avec la certitude d’être bien récompensé ?

Je lui ai alors demandé son nom et où il habitait, et il m’a répondu qu’il s’appelait Adam le Premier et qu’il habitait dans la ville de l’Erreur (Éphésiens 4:22). Je lui ai demandé quel travail il avait à me proposer et quel salaire il m’offrait, et il m’a dit : Ton travail consiste en de nombreuses délices, et ta récompense est d’être mon héritier.

Je lui ai demandé des informations sur la nourriture qu’il fournissait et sur le nombre de ses serviteurs, et il m’a répondu que dans sa maison il y avait toutes sortes de plaisirs de ce monde, et que ses serviteurs étaient ceux qu’il produisait lui-même.

Je lui ai demandé combien d’enfants il avait. Je n’ai que trois filles, a-t-il répondu. Convoitise de la Chair, Convoitise des Yeux et Orgueil de la Vie (1 Jean 2:26), et il m’a promis de me marier avec l’une d’elles, si je le désirais. Je lui ai enfin demandé combien de temps il souhaitait que je sois à son service, et il m’a dit : aussi longtemps qu’il vivrait.

Chrétien – Et quelle décision as-tu prise ?

Fidèle – Je confesse qu’au début, je me suis senti enclin à aller avec lui, car ses paroles étaient assez agréables ; mais en le regardant bien, j’ai vu ces mots écrits sur son front : «Dépouillez-vous du vieil homme avec toutes ses œuvres».

Chrétien – Et ensuite ?

Fidèle – Oh ! Ensuite, une pensée s’est enfoncée dans mon esprit, comme avec des clous de feu : aussi flatteur qu’il soit maintenant, il me vendrait comme esclave une fois qu’il m’aurait en son pouvoir. Ne vous donnez plus cette peine, lui ai-je dit, car je ne veux même pas m’approcher de la porte de votre maison.

Il s’est mis en colère et m’a adressé de nombreuses insultes, m’assurant qu’il enverrait quelqu’un à ma poursuite pour rendre très amer pour mon âme le chemin que je suivais. Je lui ai tourné le dos pour continuer ma marche, mais à ce moment-là, j’ai senti qu’il m’attrapait et qu’il m’arrachait une partie de moi-même, et j’ai alors crié : «Misérable homme que je suis !» (Rom. 7:24). Et j’ai continué mon chemin, quand j’ai remarqué qu’un personnage plus rapide que le vent me suivait, et il m’a rattrapé exactement à l’endroit du repos.

Chrétien – De bien tristes souvenirs me viennent à l’esprit à propos de ce lieu. C’est précisément là que je me suis assis pour me reposer, et le sommeil m’ayant vaincu, ce parchemin est tombé de ma poitrine.

Fidèle – Comme je le disais, cher frère, au moment où cet homme m’a rattrapé, il m’a asséné un coup si fort qu’il m’a jeté à terre, me laissant pour mort. Dès que j’ai repris mes esprits, je lui ai demandé pourquoi il me traitait ainsi, et il m’a répondu : Parce que tu t’es secrètement incliné vers Adam le Premier. En prononçant ces mots, il m’a frappé une nouvelle fois à la poitrine, me projetant au sol, presque sans vie à ses pieds. Quand j’ai repris connaissance, je lui ai demandé grâce. Et de nouveau, il m’a jeté à terre. Et il m’aurait certainement achevé, si quelqu’un n’était pas passé par là pour lui ordonner de s’arrêter.

Chrétien – Et qui était ce quelqu’un ?

Fidèle – Je ne l’ai pas reconnu au premier regard, mais en remarquant les blessures qu’il avait aux mains et au côté, j’ai compris que c’était le Seigneur. Grâce à Lui, j’ai pu continuer sur le chemin du défilé.

Chrétien – L’homme qui s’était emparé de toi, c’était Moïse¹, qui ne pardonne à personne et ne sait pas compatir avec ceux qui transgressent sa loi.

Fidèle – Cela, je le sais très bien, car ce n’était pas la première fois que je le rencontrais. C’est lui qui m’avait cherché, quand j’étais bien tranquille chez moi, pour me prévenir qu’il brûlerait maison et tout, si je continuais d’y habiter.

Chrétien – Et n’as-tu pas vu une maison au sommet de la pente où tu as rencontré Moïse ?

Fidèle – Si, je l’ai vue. Et j’ai aussi vu les lions, avant d’y arriver. Mais ils m’ont paru endormis. Et comme il me restait encore quelques heures de soleil, je ne me suis pas arrêté pour parler au portier, et j’ai continué ma descente.

Chrétien – Je me rappelle maintenant qu’il m’avait dit t’avoir vu passer. Tu ne peux imaginer combien j’aurais aimé que tu sois entré dans le palais. Tu y aurais vu tant de choses extraordinaires que tu ne les oublierais jamais de ta vie. Et dans la Vallée de l’Humiliation, n’as-tu rencontré personne ?

Fidèle – J’ai rencontré le Mécontentement, qui a essayé de me persuader de revenir avec lui ; à son avis, cette vallée est complètement déshonorée. Il a ajouté que s’y promener serait désagréable pour mes amis Orgueil, Arrogance, Vanité, Gloire Mondaine, et d’autres encore qu’il savait avec certitude qu’ils se sentiraient offensés si j’étais assez sot pour tenter de traverser cette vallée.


______________________

¹ Les Écritures présentent le développement du caractère de Moïse, qui au début était violent et vindicatif (Exode 2:11-15). Mais en connaissant le Seigneur, il en vint à craindre la parole du Seigneur, qui à cette époque était la Loi. Le Seigneur l’aimait, et la communion entre eux fit de Moïse l’homme le plus doux de son époque (Nb 12:3).


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