dimanche 6 juillet 2025

Le Pèlerin, semaine 4, lundi, chapitre 12

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN

VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 12

SEMAINE 4 - LUNDI

Lire et prier : « Trop parler ne manque pas de transgression, mais celui qui retient ses lèvres est un homme prudent. » (Pr 10.19)


Chrétien rencontre Loquace

En Loquace se présente le vrai portrait de nombreux faux docteurs de la Religion, qui la réduisent à beaucoup de paroles et aucune œuvre.

Les deux pèlerins étaient plongés dans cette importante conversation, quand je vis en songe que Fidèle, regardant sur le côté du chemin, aperçut un homme appelé Loquace, qui marchait un peu à l’écart d’eux, car le chemin était si large qu’il y avait de la place pour tous. C’était un homme grand, mieux vu de loin que de près. Fidèle l’appela, lui demandant s’il se dirigeait vers le Pays Céleste.

Loquace – Exactement. C’est bien là que je me rends.

Fidèle – Nous aussi. Et si vous voulez venir avec nous, nous profiterons de votre agréable compagnie.

Loquace – Je vous accompagnerai très volontiers.

Fidèle – Marchons donc ensemble, et mettons à profit notre temps par des conversations édifiantes.

Loquace – Tout ce qui est conversations utiles me plaît beaucoup, et je me félicite sincèrement d’avoir trouvé des personnes qui se consacrent à une si bonne œuvre, car en vérité, rares sont ceux qui emploient leur temps ainsi en voyageant ; la plupart préfèrent parler de choses frivoles, ce qui me chagrine toujours beaucoup.

Fidèle – C’est vraiment bien triste, car rien n’est plus digne de notre conversation que les choses qui appartiennent à Dieu et au ciel.

Loquace – Comme j’aime vous entendre parler ainsi ! Car vos paroles révèlent une profonde conviction. Y a-t-il quelque chose de comparable au plaisir et au profit qu’on tire de parler des choses de Dieu ? Si l’on aime les choses merveilleuses, telles que l’histoire, les mystères, les miracles, les prodiges et les signes, où trouvera-t-on une lecture aussi agréable, et écrite d’une manière si douce, que dans les Saintes Écritures ?

Fidèle – C’est vrai, mais nous devons toujours tirer profit de notre conversation.

Loquace – Je suis bien d’accord. Parler de ces choses est très profitable, car cela permet de parvenir à la connaissance de bien d’autres, telles que la vanité des choses du monde et l’utilité des choses célestes. Voilà pour le général ; et si l’on descend dans les détails, on peut apprendre la nécessité d’une nouvelle naissance, l’insuffisance de nos œuvres, le besoin que nous avons de la Justice du Christ, etc.

Dans cette conversation, on peut aussi apprendre ce que sont la repentance, la foi, la prière, la souffrance, et autres choses semblables. Nous pouvons également connaître les grandes promesses et consolations de l’Évangile, pour notre propre bien ; et enfin, apprendre comment réfuter les fausses opinions, défendre la vérité et enseigner les ignorants.

Fidèle – Tout cela est très vrai, et je me réjouis beaucoup de vous entendre parler ainsi.

Loquace – Le manque de ces pratiques explique pourquoi si peu comprennent le besoin de la foi et de l’œuvre de la grâce dans leur âme pour obtenir la vie éternelle ; et pourquoi tant vivent, par ignorance, sous les œuvres de la loi, par lesquelles l’homme ne peut en aucune manière entrer dans le royaume des cieux.

Fidèle – Permettez-moi de vous dire que la connaissance spirituelle de ces choses me semble être un don de Dieu. Personne ne les obtient simplement en en parlant ou par des efforts humains.

Loquace – Je le sais parfaitement, car rien ne nous est donné si ce n’est d’en haut. Tout est par la grâce, rien par les œuvres, des centaines de versets le confirment.

Fidèle – Très bien. Limitons à présent notre conversation à un sujet particulier.

Loquace – Quel sujet choisissez-vous ? Voulez-vous que je vous parle de choses terrestres ou célestes ? Morales ou évangéliques ? Sacrées ou profanes ? Passées ou futures ? Étrangères ou locales ? Essentielles ou secondaires ? Choisissez, et je parlerai de ce que vous voudrez, à condition qu’on en retire un profit.

Fidèle – (Étonné et s’approchant de Chrétien, qui jusque-là était resté un peu en retrait) : Quel bon compagnon nous avons trouvé ; ce doit être un excellent pèlerin !

Chrétien – (Souriant modestement) – Cet homme, que tu trouves si aimable, est capable de tromper vingt personnes qui ne le connaissent pas.

Fidèle – Et tu le connais ?

Chrétien – Le connaître ? Je le connais mieux que lui-même.

Fidèle – Alors, qui est-ce ?

Chrétien – Il s’appelle Loquace, et il vit dans la ville où nous sommes nés ; je suis surpris que tu ne le connaisses pas.

Fidèle – De qui est-il le fils ? Où habite-t-il ?

Chrétien – C’est le fils d’un certain Bien Parlant, qui vivait dans la rue des Belles Paroles ; mais malgré sa langue d’argent, c’est un homme plutôt quelconque.

Fidèle – Pourtant, il semble être un homme très respectable.

Chrétien – Oui, pour qui ne le connaît pas ; il paraît meilleur en voyage ; chez lui, c’est une toute autre histoire. Quand tu as dit qu’il semblait être un homme convenable, je me suis souvenu de certains tableaux de peintres, qui font plus bel effet de loin que de près.

Fidèle – Je ne sais si je dois prendre tes paroles comme une plaisanterie, car je te vois sourire.

Chrétien – Que Dieu me garde de plaisanter sur ce sujet, bien que j’aie souri ; et que le Seigneur ne permette pas que j’accuse qui que ce soit à tort. Je vais maintenant te dire ce que je sais de cet homme. Toutes les compagnies lui conviennent ; toutes les conversations lui plaisent ; ce qu’il t’a dit tout à l’heure, il le répétera dans une taverne. Plus il boit, plus il parle de ces choses. La vraie religion n’est ni dans son cœur, ni dans sa maison, ni dans sa vie ; tout ce qu’il a est sur le bout de sa langue, et sa religion consiste à proclamer qu’il en a une.

Fidèle – Tu parles sérieusement ? Je me suis donc bien trompé sur ce personnage !

Chrétien – Je parle sérieusement. Tu peux me croire : tu te trompes beaucoup sur lui. Souviens-toi du proverbe : « Ils disent et ne font pas », car le royaume de Dieu ne consiste pas en paroles, mais en puissance (Matthieu 23.3 ; 1 Corinthiens 4.20). Il parle de prière, de repentance, de foi, de nouvelle naissance, mais il ne ressent rien de tout cela ; il ne fait que parler. Je l’ai observé et étudié de près, chez lui comme ailleurs, et je sais que ce que je dis est la pure vérité. Sa maison est aussi dépourvue de religion que le blanc d’œuf est sans saveur.

Il n’y a ni prière ni le moindre signe de repentance du péché ; les bêtes, à leur manière, servent Dieu mieux que lui. De plus, il est une vraie tache \[réputation], un opprobre et une honte pour la religion, aux yeux de tous ceux qui le connaissent (Romains 2.23-24). Dans son quartier, on n’entend presque jamais un mot favorable à la religion, et c’est à cause de lui : les gens disent habituellement qu’il est un saint dehors et un démon chez lui. Sa propre famille le connaît bien, car il est si grossier et colérique avec tous qu’ils ne savent comment lui plaire, ni comment lui parler.

Ceux qui ont des affaires avec lui disent sans détour qu’ils préfèrent traiter avec un mahométan, car ils sont certains de trouver plus d’honnêteté chez un disciple de Mafoma¹. Ce n’est que lorsqu’il ne le peut pas qu’il s’abstient de tromper, de frauder et d’abuser ceux avec qui il traite ; le pire, c’est que s’il découvre chez l’un d’eux une crainte ignorante (ainsi appelle-t-il les premiers signes de sensibilité de la conscience), il l’appelle sot, imbécile et stupide, à n’en plus finir, refuse de l’employer à quelque tâche que ce soit, et ne veut même pas le recommander à personne.

Quant à moi, je suis convaincu que sa vie scandaleuse a déjà causé la chute de beaucoup, et, si Dieu ne l’arrête pas, ce sera la ruine de bien d’autres.


_____________________

¹ Mafoma est une forme archaïque et portugaise de désigner Mahomet, le prophète fondateur de l'islam. Ce terme a été utilisé au Moyen Âge et dans des textes anciens, souvent avec une connotation péjorative ou déformée, surtout dans les contextes chrétiens. Aujourd'hui, l’usage de « Mafoma » est considéré comme obsolète et irrespectueux — le nom correct et respectueux est Mahomet en français, ou Muhammad en arabe.


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