lundi 30 juin 2025

Le Pèlerin, semaine 3, vendredi, chapitre 11

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 11

SEMAINE 3 - VENDREDI

Lire et prier : « C’est que la chair a des désirs contraires à ceux de l’Esprit, et l’Esprit en a de contraires à ceux de la chair ; ils sont opposés entre eux, afin que vous ne fassiez point ce que vous voudriez. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes point sous la loi. » (Galates 5:17-18)


Chrétien trouve en Fidèle un excellent compagnon ;

La crainte prudente qu’il eut de s’unir à lui nous enseigne que nous devons être très vigilants dans le choix de nos compagnons de foi. Conversations profitables qu’ils eurent ensemble.

Après tout cela, notre Pèlerin arriva à une hauteur élevée tout exprès afin que les voyageurs pussent de là apercevoir le chemin qu’ils devaient suivre. Il vit, bien en avant, Fidèle, à qui il cria : Holà, holà, attends-moi que nous marchions ensemble !

Fidèle se retourna, entendit Chrétien l’appeler encore, et répondit : Je ne puis m’arrêter. Ma vie est en danger, car le vengeur du sang est à mes trousses. Cette réponse affligea fort Chrétien, mais, rassemblant tout son courage, il rejoignit bientôt Fidèle, le dépassa même, si bien que le dernier devint le premier.

Il sourit, se glorifiant d’avoir pris la tête sur son frère ; mais, ne prenant garde à ses pas, il trébucha tout à coup et tomba, ne pouvant se relever que lorsque Fidèle vint à son secours. Je vis alors, dans mon songe, qu’ils marchaient ensemble dans la plus grande harmonie, s’entretenant avec plaisir de tout ce qui leur était arrivé durant leur voyage. Chrétien commença à parler en ces termes :

Chrétien – Honorable et cher frère Fidèle, je suis tout réjoui de t’avoir rejoint, et que Dieu ait ainsi disposé nos cœurs pour que nous marchions ensemble sur cette route si agréable !

Fidèle – J’avais l’intention de venir avec toi depuis notre ville ; mais tu t’es avancé si vite que j’ai dû venir seul.

Chrétien – Combien de temps es-tu resté encore dans la ville de Destruction après mon départ ?

Fidèle – J’y suis resté jusqu’à ce que je ne pusse plus le supporter, car, dès que tu partis, on commença à dire que la ville serait réduite en cendres par le feu du ciel.

Chrétien – Que dis-tu ? Nos voisins disaient cela ?

Fidèle – Oui, ils le disaient ; et pendant un certain temps, il ne se parlait plus que de cela.

Chrétien – Et malgré cela, toi seul as cherché à te mettre en sûreté ?

Fidèle – Bien qu’on parlât beaucoup du danger, il me semblait qu’on n’y croyait guère, car dans l’ardeur des discussions, j’ai entendu certains se moquer de toi et de ton voyage, qu’ils appelaient désespéré. Mais moi, je crus, et je crois encore, que notre ville sera consumée par le feu et le soufre, et c’est pourquoi je me suis enfui.

Chrétien – As-tu entendu parler du voisin Flexible ?

Fidèle – J’ai entendu dire qu’il avait poursuivi jusqu’au Bourbier du Doute, où il serait tombé, car il ne veut pas qu’on sache ce qui lui est arrivé ; mais ce qu’il n’a pu cacher, c’est la boue dont il était couvert.

Chrétien – Et qu’ont dit les voisins ?

Fidèle – Depuis qu’il est revenu, il est l’objet du mépris et des moqueries de tout le monde, au point qu’il ne trouve presque personne pour lui donner du travail. Il est maintenant bien plus malheureux qu’avant son départ de la ville.

Chrétien – Mais comment expliquer le mépris dans lequel on le tient, si l’on méprise aussi le chemin qu’il a quitté ?

Fidèle – On l’appelle renégat, pour n’avoir pas été fidèle à sa profession. Je crois que Dieu a poussé même ses ennemis à se moquer de lui, pour avoir abandonné son chemin (Jérémie 38:18-19).

Chrétien – Lui as-tu parlé avant de partir ?

Fidèle – Je l’ai rencontré une fois dans la rue, mais il détourna la tête comme honteux de ce qu’il avait fait, et ainsi nous ne nous sommes pas parlé.

Chrétien – Au début de mon voyage, j’avais quelque espoir en lui ; mais maintenant je crains qu’il ne périsse dans les ruines de la ville, car il lui est arrivé ce que dit ce vrai proverbe : « Le chien est retourné à ce qu’il avait vomi, et la truie lavée s’est vautrée dans le bourbier. » (2 Pierre 2:22)

Fidèle – Moi aussi, je le crains ; mais qui peut connaître l’avenir ?

Chrétien – Tu as raison. Ne parlons plus de lui ; occupons-nous plutôt des choses qui nous intéressent davantage. Raconte-moi ce qui t’est arrivé sur le chemin. Il se peut que tu aies rencontré des choses dignes d’être racontées.

Fidèle – Je ne suis pas tombé dans le bourbier où, comme je le vois, tu es tombé, et je suis arrivé à la porte étroite sans ce danger ; mais j’ai rencontré une certaine dame appelée Sensualité, dont j’ai bien failli souffrir.

Chrétien – Heureux es-tu d’avoir échappé à ses pièges. À cause d’elle, Joseph fut en grand danger, et il s’en sauva, comme toi, non sans un grand péril de mort. Alors, que t’a-t-elle fait ? (Genèse 39:11-12)

Fidèle – Seul celui qui l’a entendue peut savoir combien sa langue est flatteuse : elle fit tout pour me perdre, me promettant toutes sortes de plaisirs.

Chrétien – À coup sûr, elle ne t’a pas promis le plaisir d’une conscience tranquille.

Fidèle – Tu sais bien que je parle des plaisirs charnels.

Chrétien – Remercie Dieu de t’en avoir délivré.

« Celui contre qui l’Éternel est irrité tombera dans ses pièges. » (Proverbes 22:14)


Appréciez davantage :  

Hymne 190

Soupirs – « Pour Vivre dans la Présence du Seigneur »


Le Pèlerin, semaine 3, jeudi, chapitre 10

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 10

SEMAINE 3 - JEUDI

Lire et prier : « Cherchez celui qui a fait les Pléiades et Orion, qui change l’obscurité profonde en aurore, et transforme le jour en nuit ; celui qui appelle les eaux de la mer et les répand sur la surface de la terre ; l’Éternel est son nom. » (Amos 5:8)


Chrétien dans la Vallée de l’Ombre de la Mort (2)

Mon attention se fixa alors sur un fait que je ne puis omettre de rapporter. Je remarquai que le pauvre  hrétien était si effrayé qu’il ne reconnaissait plus sa propre voix, et je le compris par les circonstances que je vais relater.

Lorsque Chrétien arriva au bord de l’abîme embrasé, l’un des démons s’approcha de lui sans être perçu et lui souffla à l’oreille de nombreuses et très terribles blasphèmes, et le pauvre Chrétien croyait que c’était son âme elle-même qui les proférait. Ce fait l’affligea plus que tout ce qui lui était arrivé jusque-là : penser qu’il blasphémait contre celui qu’il avait tant aimé auparavant ! Mais il ne songea pas à se boucher les oreilles ni à chercher d’où venaient ces blasphèmes.

Il se trouvait depuis quelque temps déjà dans cette triste situation, quand il crut entendre la voix d’un homme qui marchait devant lui, s’écriant : « Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi » (Psaume 23:4). Ces paroles le réjouirent pour plusieurs raisons.

1° – Parce qu’elles prouvaient qu’un autre craignant Dieu se trouvait aussi dans cette vallée.

2° – Parce qu’il comprenait que Dieu était avec cet homme, malgré l’obscurité et la tristesse qui les entouraient. Et pourquoi ne serait-il pas aussi avec moi, pensa Chrétien en lui-même, même si je ne le perçois pas, vu l’endroit où je me trouve ? (Job 9:11).

3° – Parce qu’il espérait jouir de la compagnie de celui ou de ceux dont il avait entendu la voix, s’il parvenait à les rejoindre. Il reprit courage et décida de continuer sa marche, appelant celui qui le précédait, mais celui-ci, se croyant également seul, ne répondit jamais. L’aurore commençait alors à poindre, et Chrétien s’écria : « Il change l’obscurité en matinée » (Amos 5:8). Ensuite, le jour apparut, et Chrétien continua : « Et transforme la nuit en jour. »

Le jour étant levé, il regarda en arrière, non parce qu’il désirait retourner, mais pour voir, à la lumière du soleil, les dangers qu’il avait traversés pendant la nuit.

Il vit alors parfaitement l’abîme d’un côté et le marécage de l’autre, et considéra combien le sentier était étroit entre les deux : il vit également les fantômes, les loups-garous et les dragons de l’abîme, mais tous très loin, car ils n’osaient s’approcher de la lumière du jour. Cependant, Chrétien les voyait, car, comme il est écrit : « Il met en lumière ce qui est caché dans les ténèbres, il met à découvert les ombres de la mort » (Job 12:22).

Chrétien fut profondément impressionné de se voir délivré des dangers de cette vallée solitaire ; car bien qu’il les eût beaucoup redoutés, il en mesurait mieux maintenant la gravité en les regardant à la lumière du jour.

Le soleil brilla alors, ce qui fut un grand secours pour le voyageur, car si la première partie de la vallée avait été extrêmement dangereuse, la seconde, qu’il lui restait à parcourir, promettait d’être encore plus périlleuse, vu que, depuis l’endroit où Chrétien se trouvait jusqu’à la fin de la vallée, le chemin était rempli de pièges, de filets et d’obstacles, et comportait de nombreux abîmes, précipices, fosses et ravins, si bien que, s’il avait encore fait nuit comme dans la première partie du chemin, mille âmes qu’eût possédées Chrétien, toutes les aurait-il irrémédiablement perdues ; mais heureusement, le soleil brillait dans tout son éclat. Il dit alors en lui-même : Sa lampe brillait sur ma tête, et, guidé par sa lumière, je marchais dans les ténèbres (Job 29:3).

Avec cette lumière, Chrétien arriva à la fin de la vallée, où je vis, dans mon rêve, du sang, des os, des cendres et des corps d’hommes déchirés : c’étaient les restes des voyageurs qui, dans les temps passés, avaient marché par ce chemin. Je réfléchissais à ce qui avait pu causer tant de destructions, quand je découvris plus loin une caverne où avaient habité deux géants, le Pape et le Païen, dont le pouvoir et la tyrannie avaient provoqué ces horreurs.

Chrétien passa par cet endroit sans grand danger, ce qui m’étonna beaucoup ; mais je compris ensuite que le Païen était mort depuis longtemps, et que l’autre, bien qu’encore vivant, en raison de son grand âge et des violents assauts qu’il avait subis dans sa jeunesse, était si décrépit et dans une telle situation qu’il ne pouvait plus que rester à l’entrée de sa caverne, menaçant les pèlerins qui passent et se désespérant de ne pouvoir les atteindre. Pendant ce temps, Chrétien poursuivait son chemin. La vue du vieillard, assis à l’entrée de la caverne, lui donna matière à réflexion, surtout lorsque celui-ci, ne pouvant se mouvoir, cria : Vous n’aurez point de salut, jusqu’à ce que beaucoup d’autres, comme vous, soient livrés aux flammes.

Mais Chrétien ne répondit rien, et, passant sans crainte et sans aucun dommage, s’écria : Ô monde de merveilles ! Et c’est bien vrai, car je suis indemne, malgré la misère que j’ai trouvée en toi. Bénie soit la main miséricordieuse à qui je dois ma préservation ; durant mon séjour dans cette vallée, les dangers des ténèbres, les ennemis, l’enfer et le péché m’ont entouré. Mon chemin était semé d’innombrables pièges, d’abîmes, d’obstacles de toutes sortes ; mais grâces soient rendues à Jésus, qui m’a délivré de tout. À lui la couronne du triomphe.


Appréciez davantage :

Hymne « Réconfort dans les épreuves – Pour les gains issus de la souffrance »

https://hinario.org/detail.php?id=807

Le Pèlerin, semaine 3, mercredi, chapitre 10

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA VILLE CÉLESTE

CHAPITRE 10

SEMAINE 3 - MERCREDI

Lire et prier : « Délivre-moi de la boue, et que je ne m’enfonce plus ;
que je sois délivré de ceux qui me haïssent, et des profondeurs des eaux. »
(Psaume 69:14)

Chrétien dans la Vallée de l’Ombre de la Mort

Chrétien subit beaucoup d’afflictions dans la Vallée de l’Ombre de la Mort ; mais, ayant appris par l’expérience combien il est nécessaire de marcher avec vigilance, il recourt à l’épée et à la prière, traversant ainsi cette vallée en toute sécurité et sans le moindre dommage.

À peine avait-il franchi la limite qui sépare la Vallée de l’Humiliation de celle de l’Ombre de la Mort, qu’il rencontra deux hommes qui revenaient à toute vitesse : c’étaient des fils de ceux qui avaient enflammé le pays qu’il avait vu (Nombres 13:33). Chrétien leur demanda où ils allaient.

Hommes – Retourne, retourne : si tu tiens à ta vie et à ta tranquillité, nous te conseillons de faire demi-tour immédiatement !

Chrétien – Pourquoi donc ?

Hommes – Nous marchions dans la direction que tu prends, et nous avons avancé aussi loin que notre audace nous le permettait, mais nous ne savons même pas comment nous avons pu revenir, car si nous avions fait quelques pas de plus, nous ne serions sûrement pas ici pour t’en avertir.

Chrétien – Mais qu’avez-vous rencontré ?

Hommes – Que nous avons rencontré ? Nous étions presque au milieu de la Vallée de l’Ombre de la Mort ; mais, par bonheur, nous avons regardé devant nous et aperçu le danger avant de nous en approcher (Psaume 44:19).

Chrétien – Quel danger ?

Hommes – Quel danger ? Cette vallée elle-même, noire comme du poix. Nous y avons vu des fantômes, des loups-garous et des dragons de l’abîme. Ensuite, des gémissements et des cris continuels, comme de personnes dans une situation affreuse, endurant les plus grandes afflictions et tortures. Au-dessus de la vallée planent d’horribles nuages de confusion, et la mort étend constamment sur elle ses ailes noires. En un mot, tout y est horreur, tout y est désordre effrayant (Job 3:5-10,22).

Chrétien – À ce que vous dites, je suis de plus en plus convaincu que c’est ce chemin que je dois suivre pour atteindre le port désiré (Psaume 44:18).

Hommes – Si tu le trouves bon, vas-y ; quant à nous, il ne nous convient pas.

Et ils se séparèrent de Chrétien, qui continua son chemin, gardant son épée dégainée, de peur d’être attaqué.

Et, dans mon songe, j’étendis mon regard sur toute l’étendue de la vallée. Je vis, à droite du chemin, un gouffre très profond où des aveugles ont conduit d’autres aveugles au fil du temps, tous ayant péri misérablement. À gauche, je vis un bourbier extrêmement dangereux, où quiconque y tombe, même s’il est le meilleur des hommes, ne peut y trouver appui ; c’est là que le roi David tomba une fois, et il se serait sûrement noyé si Celui qui a le pouvoir de sauver ne l’avait secouru (Psaume 69:14).

Le chemin était si étroit que Chrétien marchait avec grande difficulté, car, comme il faisait sombre, s’il tentait de s’éloigner du gouffre, il risquait de tomber dans le bourbier, et s’il voulait éviter le bourbier, il était sur le point de se précipiter dans le gouffre. Il marcha ainsi en poussant de profonds soupirs, car, en plus des dangers mentionnés, le chemin était si obscur que, lorsqu’il levait un pied pour faire un pas, il ne savait pas où il allait le poser.

À peu près au milieu de cette vallée, s’ouvrait la gueule de l’enfer, juste à côté du chemin.

En arrivant là, la situation de Chrétien fut horrible ; il ne savait que faire ; il voyait sortir des flammes et de la fumée en grande quantité, enveloppées d’étincelles et de rugissements infernaux, si bien qu’en reconnaissant que l’épée avec laquelle il avait vaincu Apollyon ne lui serait d’aucune utilité, il décida de la rengainer et de prendre une autre arme, c’est-à-dire l’arme de la prière (Éphésiens 6:18), et il s’écria : « Seigneur, délivre mon âme » (Psaume 116:4).

Et il continua sa marche, enveloppé de temps en temps par d’horribles flammes. Parfois, il entendait de tristes gémissements, courant d’un côté à l’autre, au point qu’il croyait être réduit en miettes ou piétiné comme la boue des rues. Ce spectacle horrible et ces bruits terrifiants l’accompagnèrent sur plusieurs lieues du chemin.

Il arriva finalement à un endroit où il crut entendre une légion d’ennemis s’approcher. Il s’arrêta donc et se mit à réfléchir sérieusement à ce qu’il convenait de faire. D’un côté, il lui semblait préférable de revenir en arrière, mais de l’autre, il se rappela qu’il avait peut-être déjà dépassé la moitié de la vallée. Il se souvint aussi qu’il avait déjà surmonté de nombreux dangers, et que le risque de reculer pouvait être plus grand que celui d’avancer ; il décida donc de continuer. Mais comme les ennemis semblaient se rapprocher toujours plus, presque à le toucher, il s’écria de toutes ses forces : Je marcherai dans la force du Seigneur. À ces paroles, les ennemis s’enfuirent et ne le poursuivirent plus.


Profitez davantage :

Hymne « Plénitude de l’Esprit – Comme le Vent »

Le Pèlerin, semaine 3, mardi, chapitre 9

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 9

SEMAINE 3 - MARDI

Lire et prier : « Au milieu de la place de la ville, et sur les deux bords du fleuve, était l’arbre de vie, produisant douze récoltes, rendant son fruit chaque mois ; et les feuilles de l’arbre sont pour la guérison des nations. » (Ap 22:2)


Chrétien arrive dans la vallée de l’Humiliation (2)

Apollyon – Puisque tu conserves encore ton calme et ton sang-froid, réfléchis bien à ce que tu risques de trouver sur ce chemin. Tu sais que la plupart de ses serviteurs ont une fin misérable, pour avoir transgressé contre moi et mes intentions. Combien n’ont-ils pas été victimes d’une mort honteuse ! De plus, si son service est meilleur que le mien, pourquoi n’est-il pas encore sorti de l’endroit où il est pour délivrer ceux qui le servent ? Moi, c’est tout le contraire : combien de fois, comme peut en témoigner le monde entier, par la force ou par la ruse, ai-je délivré ceux qui me servent fidèlement de ses mains à lui et des siens, bien qu’ils fussent sous leur pouvoir ? Je te promets que je ferai de même pour toi.

Chrétien – S’il tarde à les délivrer, c’est, semble-t-il, pour manifester plus clairement son amour et voir s’ils lui restent fidèles jusqu’à la fin. Quant à cette fin misérable dont tu parles, beaucoup l’ont eue, et c’était assurément la fin la plus glorieuse qu’ils pouvaient avoir. Car ils n’attendent pas un salut immédiat, sachant qu’il faut du temps pour parvenir à la gloire ; et cette gloire, ils l’auront lorsque leur Prince viendra dans sa gloire, et dans celle des anges.

Apollyon – Comment peux-tu espérer recevoir un salaire, si tu as déjà été infidèle dans ton service ?

Chrétien – En quoi ai-je été infidèle ?

Apollyon – Allons donc ! Dès que tu es sorti de ta maison, tu as défailli quand tu t’es vu en danger de te noyer dans le Bourbier du Découragement ; ensuite tu as cherché, de plusieurs manières, à te débarrasser du fardeau qui t’oppressait, au lieu d’attendre, comme tu le devais, que ton Prince t’en délivre. Puis, tu t’es endormi fautivement, perdant à ce moment-là l’objet le plus précieux que tu possédais. La peur des lions t’a aussi presque fait reculer, et surtout, quand tu parles de ton voyage et de ce que tu as vu et entendu, c’est un esprit de vaine gloire qui te domine intérieurement.

Chrétien – Tu as bien raison dans ce que tu dis, et tu pourrais en dire encore bien davantage, mais le Prince que je sers et que je vénère est miséricordieux et prêt à pardonner ! De plus, tu oublies sans doute que ces faiblesses se sont emparées de moi alors que j’étais encore dans ton pays ; c’est là que j’en ai été vaincu, et elles m’ont coûté beaucoup de peines et de soupirs, mais je me suis repenti de tout, et mon Prince m’a pardonné !

Apollyon, ne pouvant plus contenir la fureur qui le possédait, éclata en ces injures : Je suis l’ennemi de ce prince, j’abhorre sa personne, ses lois et son peuple, et je viens avec la ferme intention de t’empêcher de passer.

Chrétien – Prends garde à ce que tu fais, Apollyon, car je suis sur la route royale, le chemin de la sainteté, et par conséquent, je suis bien supérieur à toi. À ces mots, Apollyon étendit les jambes pour occuper toute la largeur du chemin, et dit : – Ne crois pas que j’aie peur de toi ; prépare-toi à mourir, car je te jure, par l’abîme infernal que j’habite, que tu ne passeras pas. Je vais t’arracher l’âme. Et, en même temps, il lança avec grande fureur un dard de feu contre la poitrine de Chrétien, qui, ayant son bouclier au bras, para le coup et échappa au danger.

Chrétien tira aussitôt l’épée, reconnaissant qu’il était temps de passer à l’attaque, et Apollyon se jeta sur lui, lançant des traits aussi nombreux et intenses que la grêle, au point de le blesser à la tête, aux mains et aux pieds, malgré les efforts qu’il faisait pour se défendre. Ces blessures le firent reculer quelque peu, circonstance qu’Apollyon saisit pour redoubler d’assaut avec plus d’énergie ; mais Chrétien, se ranimant, résista avec la plus grande bravoure.

Ce furieux combat se prolongea jusqu’à midi, moment où les forces de Chrétien furent épuisées, et à cause de ses blessures, il s’affaiblissait de plus en plus.

Apollyon ne manqua pas de profiter de cet avantage, et abandonnant les dards, l’attaqua corps à corps. Le choc fut si rude que Chrétien laissa tomber son épée. – Maintenant tu es à moi – s’écria Apollyon, l’étreignant avec tant de force qu’il faillit l’étouffer.

Chrétien crut qu’il allait mourir ; mais Dieu voulut que, au moment où Apollyon allait porter le coup fatal, Chrétien saisît rapidement l’épée, qui était à terre, et s’écria : « Ne te réjouis pas à mon sujet, mon ennemie ! Si je suis tombé, je me relèverai encore » (Mi 7:8). Et il lui porta un coup mortel qui le força à se retirer, comme s’il recevait le coup final. En voyant cela, Chrétien redoubla d’énergie, et l’attaqua de nouveau, disant : « Mais dans toutes ces choses nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés » (Rm 8:37).

Apollyon ouvrit ses ailes de dragon, s’enfuit précipitamment, et Chrétien ne le revit plus (Jacques 4:7). Seul celui qui, comme moi, a assisté à ce combat peut se faire une idée des cris et rugissements horribles qu’Apollyon poussa pendant la lutte. Sa voix ressemblait à celle du dragon, et elle contrastait avec les soupirs et les gémissements douloureux qui sortaient du cœur du Pèlerin. Long fut le combat, et pendant celui-ci, un seul éclat de joie brilla dans les yeux de Chrétien, lorsqu’il frappa Apollyon avec son épée à deux tranchants. Il leva alors les yeux vers le ciel et sourit. Je n’ai jamais vu un combat aussi acharné !

Le combat terminé, Chrétien pensa à rendre grâces à celui qui l’avait délivré de la gueule du lion, à celui qui l’avait secouru contre Apollyon. Et, s’agenouillant, il s’écria : Bélial avait résolu de me perdre, en m’envoyant ce suppôt armé ; long fut le combat, terrible fut la lutte ; mais le Béni, le Saint, est venu à mon secours, l’a obligé à fuir par la force de mon épée ; que le Seigneur soit loué éternellement, que mille actions de grâce et bénédictions soient rendues à son saint nom.

Alors une main mystérieuse lui donna quelques feuilles de l’arbre de vie (Apoc. 22:2). Chrétien les appliqua sur les blessures qu’il avait reçues dans le combat, et il fut entièrement guéri. Puis il s’assit en ce lieu, pour manger le pain et boire le vin qu’on lui avait donnés peu auparavant. Ainsi fortifié, il poursuivit son chemin, tenant à la main l’épée dégainée, de peur qu’un autre ennemi ne lui surgît. Mais rien d’autre ne se présenta à lui dans toute la vallée.

Après avoir traversé la Vallée de l’Humiliation, il entra dans la Vallée de l’Ombre de la Mort, que traverse le chemin menant à la Cité Céleste ; cette vallée est très solitaire, comme nous la décrit le prophète Jérémie :

Un désert, une terre inhabitée et sans chemin, une terre de soif, image de la mort, une terre où nul homme ne passa sans être chrétien, et où nul n’habita (Jr 2:6).

Si le combat entre Chrétien et Apollyon fut terrible, celui qu’il eut à soutenir dans cette vallée ne le fut pas moins.


Appréciez davantage : 

Hymne « Louange entonnerons »

https://hinario.org/detail.php?id=1174

samedi 28 juin 2025

Le Pèlerin, semaine 3, lundi, chapitre 9

LE PÈLERIN

LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 9

SEMAINE 3 - LUNDI

Lire et prier : « Car le salaire du péché, c’est la mort ; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle en Jésus-Christ notre Seigneur. » (Romains 6:23)


Chrétien arrive dans la vallée de l’Humiliation,
où il est attaqué par le féroce Apollyon, mais le vainc
avec l’épée de l’Esprit et par la foi dans la parole de Dieu.

LE DÉPART de notre pèlerin fut alors décidé, avec le consentement des habitants du palais ; mais avant son départ, on le conduisit de nouveau à l’arsenal, où on l’équipa d’armes d’un acier très fin, pour qu’il puisse se défendre en chemin en cas d’attaque. Ensuite, ils l’accompagnèrent jusqu’à la porte, où il demanda au portier si un voyageur était passé pendant son séjour au palais. Le portier répondit affirmativement.

Chrétien — Le connais-tu ?

Portier — Non, mais je lui ai demandé son nom, et il m’a dit qu’il s’appelait Fidèle.

Chrétien — Ah ! je sais qui c’est ! Je le connais parfaitement ; c’est mon compatriote et mon voisin, et il vient de ma ville. Est-il déjà bien loin ?

Portier — Il doit être presque au bout de la descente.

Chrétien — Merci, bon homme ; que le Seigneur soit avec toi et augmente ses bénédictions à ton égard pour tout le bien que tu m’as fait.

Et il partit. Discrétion, Piété, Charité et Prudence voulurent l’accompagner jusqu’à la fin du défilé, et tous cheminèrent en conversant des choses dont ils avaient déjà parlé.

Arrivés à la descente, Chrétien dit :

Chrétien — La montée m’a semblé difficile, mais la descente ne sera pas moins dangereuse.

Prudence — C’est vrai. Il y a toujours un danger pour l’homme qui descend vers la Vallée de l’Humiliation, là où tu te rends, de glisser ; et les obstacles qu’on y trouve sont aussi périlleux. C’est pourquoi nous avons voulu t’accompagner.

Chrétien descendait avec beaucoup de prudence, mais non sans trébucher plus d’une fois. Lorsqu’ils atteignirent le bas de la pente, les personnages qui l’accompagnaient prirent congé de lui, lui remirent un pain, une bouteille de vin et une grappe de raisin.

Dès qu’il entra dans la vallée, Chrétien se trouva en difficulté. À peine avait-il fait quelques pas qu’un démon abominable, nommé Apollyon, vint à sa rencontre. Chrétien eut peur, et il commença à se demander s’il ne valait pas mieux fuir ou rester ferme à son poste. Mais il se souvint que l’armure ne protégeait pas son dos, et que, par conséquent, tourner le dos à l’ennemi lui donnerait un grand avantage, car il pourrait le blesser de ses flèches.

Il décida donc d’être courageux et de rester ferme, unique ressource qui lui restait pour conserver la vie.

Il fit encore quelques pas, et se retrouva face à face avec l’ennemi. L’apparence du monstre était horrible ; il était couvert d’écailles, semblables à celles des poissons ; il avait des ailes de dragon, des pattes d’ours ; de son ventre sortaient fumée et feu, et sa bouche ressemblait à celle d’un lion. En s’approchant de Chrétien, il le regarda avec mépris, et lui parla ainsi :

Apollyon — D’où viens-tu et où vas-tu ?

Chrétien — Je viens de la ville de Destruction, repaire de tout mal, et je vais vers la cité de Sion.

Apollyon — Tu veux donc dire par là que tu étais mon sujet, car toute cette région m’appartient, et je la domine en tant que prince et dieu. Et tu as osé te rebeller contre la domination de ton roi ? Ah ! si je n’espérais pas encore tirer grand profit de toi, je t’écraserais d’un seul coup !

Chrétien — Il est vrai que je suis né dans tes domaines ; mais ton service était si pénible, et le salaire si misérable, que je n’en vivais même pas, car le salaire du péché, c’est la mort (Romains 6:23). Ainsi, quand j’ai commencé à raisonner, j’ai fait comme toute personne sensée — j’ai cherché à améliorer ma condition.

Apollyon — Aucun prince n’aime perdre ses sujets pour si peu ; et pour ma part, je ne veux pas te perdre. Donc, puisque tu te plains du service et du salaire, reviens de bon gré dans ton pays, et je te promets tout ce qu’on peut te donner dans mes royaumes.

Chrétien — Je suis maintenant au service du Roi des rois, donc je ne peux plus retourner avec toi.

Apollyon — Tu es passé de mal en pis, comme dit le proverbe ; mais en général, ceux qui prétendent être au service d’un tel roi, se dégagent vite de son joug, et, après avoir mieux réfléchi, reviennent à moi. Fais comme eux, et tout ira bien pour toi.

Chrétien — Je lui ai donné ma parole et lui ai juré fidélité ; si je renonçais maintenant, ne mériterais-je pas d’être pendu comme traître ?

Apollyon — C’est ainsi que tu t’es comporté avec moi, et pourtant je suis prêt à oublier tout cela si tu consens à revenir.

Chrétien — Les promesses que je t’ai faites l’ont été avant mon adolescence, et n’ont donc aucune valeur. D’ailleurs, j’espère que le prince sous les bannières duquel je sers maintenant, me pardonnera tout ce que j’ai fait pour te plaire. Et, surtout, je veux te parler franchement : son service, son salaire, ses serviteurs, son gouvernement, sa compagnie et son pays me plaisent bien davantage que les tiens. Tu perds ton temps à essayer de me persuader du contraire ; je suis son serviteur, et je suis résolu à le suivre.


Appréciez davantage :  

Hymne « Assurance et Joie du Salut –

Assurés par les Provisions Divines »

https://hinario.org/detail.php?id=395

jeudi 26 juin 2025

Le Pèlerin, semaine 3, dimanche, chapitre 8

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 8

SEMAINE 3 - DIMANCHE

Lire et prier : « Ô Dieu, que ta bonté est précieuse ! À l’ombre de tes ailes les fils des hommes cherchent un refuge. Ils se rassasient de l’abondance de ta maison, et tu les abreuves au torrent de tes délices. » (Psaume 36:7-8)


Chrétien au Palais Beau (2)

Je remarquai encore, dans mon rêve, qu’ils continuaient ainsi de converser jusqu’à ce que le souper fût prêt, après quoi ils s’assirent à table, qui était garnie de mets succulents et d’excellents vins.

La conversation, durant le repas, porta sur le Seigneur du Défilé, sur ce qu’Il avait fait et les raisons qui l’avaient poussé à construire cette maison. D’après ce que j’entendis, je compris qu’il avait été un grand guerrier, qu’il avait combattu et vaincu celui qui avait le pouvoir de la mort (Hébreux 2:14-15), mais non sans avoir couru un grand danger, ce qui le rendait d’autant plus digne d’amour.

Car, selon ce qu’ils dirent, et je crois avoir entendu Chrétien le dire aussi, le Seigneur obtint cette victoire au prix de beaucoup de sang ; mais ce qui rendait cette grâce encore plus glorieuse, c’est qu’Il l’avait accomplie uniquement par l’amour qu’Il avait consacré à ce pays. Et certains membres de la famille disaient même l’avoir vu et lui avoir parlé après qu’Il fut mort sur la croix, et affirmaient également qu’Il avait dit qu’on ne pouvait trouver personne semblable, de l’orient à l’occident ; et à tel point qu’Il s’était dépouillé de sa gloire pour accomplir ce qu’Il fit, et que Son désir était d’avoir plusieurs compagnons pour habiter avec Lui sur le mont Sion, ayant fait de princes ceux qui, par nature, étaient des mendiants nés dans la boue (1 Samuel 2:8 ; Psaume 113:8).

Dans cette conversation si agréable, ils s’entretinrent jusqu’à une heure avancée de la nuit, puis se retirèrent dans leurs appartements, après s’être recommandés à la protection du Seigneur. La chambre réservée à Chrétien était située à l’étage supérieur du palais ; elle s’appelait Salle de la Paix, et avait une fenêtre donnant à l’est. Là, notre Pèlerin dormit paisiblement jusqu’à l’aube, et, s’étant réveillé, il entonna un chant qui, en doux vers, disait : « Oh ! Qu’elles sont agréables ces demeures ! En vérité, c’est ici la maison du Seigneur, c’est ici la porte des cieux ! Béni sois-tu, Jésus, toi qui pourvois ainsi aux besoins des pauvres pèlerins, leur pardonnant leurs péchés et leur permettant de se reposer dans les hauteurs ! »

Après que tous se furent levés, et s’étaient échangé les salutations du matin, Chrétien se préparait à partir, ce qu’on ne lui permit qu’après lui avoir montré certaines choses extraordinaires qui se trouvaient dans le palais.

On le mena d’abord aux Archives, où on lui présenta l’arbre généalogique du Seigneur, et selon lequel Il descendait de l’Ancien des Jours, ayant été conçu dans des splendeurs éternelles, avant même que l’étoile du matin n’existe.

Là aussi, il vit écrites en lettres de lumière, toutes ses actions et toute sa vie, ainsi que les noms de plusieurs centaines de serviteurs qui avaient conquis des royaumes, pratiqué la justice, obtenu des promesses, vaincu des lions, éteint des incendies terribles, échappé au tranchant de l’épée, survécu à de graves maladies, combattu vaillamment dans les guerres, et mis en déroute les camps ennemis (Hébreux 11:33-34).

On lui montra ensuite, dans une autre partie des Archives, la bonne disposition du Seigneur à accorder Sa faveur à toute personne qui, jadis, l’avait combattu ou s’était opposée à Ses desseins.

On lui montra aussi plusieurs récits d’exploits remarquables, tant de l’antiquité que des temps modernes, ainsi que des prédictions et des prophéties qui, en leur temps, s’étaient accomplies ; tout cela pour la terreur et la confusion des ennemis, et pour la joie et la satisfaction des amis.

Le lendemain, on le conduisit à l’arsenal, où on lui montra des armures de toutes sortes, que le Seigneur avait destinées aux pèlerins : épées, boucliers, casques, cuirasses, roue-prière¹ et brodequins² d’une durée éternelle. Il y avait tant d’équipements de guerre qu’ils auraient suffi à armer autant d’hommes au service du Seigneur qu’il y a d’étoiles dans le ciel.

On lui montra aussi les objets avec lesquels certains serviteurs avaient accompli des merveilles prodigieuses : la verge de Moïse, le clou et le marteau avec lesquels Jaël tua Sisera ; les cruches, les trompettes et les lampes avec lesquelles Gédéon vainquit les armées de Madian ; le soc de charrue avec lequel Shamma tua six cents hommes ; la mâchoire d’âne avec laquelle Samson accomplit de grands exploits ; la fronde et la pierre avec lesquelles David tua Goliath de Gath, et l’épée avec laquelle le Seigneur tuera l’homme du péché au jour où celui-ci se lèvera contre la proie ; on lui montra, en somme, beaucoup d’autres choses excellentes, à la vue desquelles Chrétien ressentit une joie ineffable. Et, comme le jour déclinait, ils se remirent au repos.

Le jour suivant, Chrétien voulait partir, mais on le pria de rester encore un jour, afin qu’on puisse lui montrer, si l’atmosphère était claire, les montagnes des Délices, dont la vue le consolerait grandement, car elles se trouvaient plus proches du port vers lequel il se dirigeait que du lieu où il se trouvait alors. Chrétien accéda à la demande.

Ils montèrent donc, au matin, sur la terrasse du palais, du côté sud, et, à une grande distance, Chrétien aperçut un pays montagneux et des plus agréables, bordé de forêts, de vignes, de vergers et de jardins de toutes sortes, alternant avec des ruisseaux et des lacs d’une beauté singulière (Ésaïe 33:16-17). Ce pays, lui dit-on, est le pays d’Emmanuel, et il est aussi libre que celui-ci pour tous les pèlerins. De là, tu apercevras la porte de la Cité Céleste. Les bergers de ces montagnes t’enseigneront le chemin.


_____________________

¹ Cuirasses roue-prière : expression composée ou poétique pour désigner un cercle de prière.


² Brodequins : bottes ou bottines en cuir, souvent portées par des soldats ou des voyageurs au Moyen Âge ou dans les temps anciens.


Appréciez davantage :

Hymne « Expérience de Christ »

https://hinario.org/detail.php?id=1561

Le Pèlerin, semaine 2, samedi, chapitre 8

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 8

SEMAINE 2 - SAMEDI

Lire et prier : « Mais maintenant ils en désirent une meilleure, c’est-à-dire une céleste. C’est pourquoi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu, car il leur a préparé une cité. » (Hébreux 11.16)


Chrétien au Palais Beau (1)

 

Piété – Continue. Tu as dû voir autre chose.

Chrétien – Je vous ai déjà raconté ce qu’il y avait de principal et de meilleur. J’ai aussi rencontré trois individus, Simplicité, Paresse et Présomption, endormis hors du chemin, enchaînés aux pieds, que j’ai tenté en vain de réveiller.

J’ai ensuite rencontré Hypocrisie et Formaliste, qui avaient sauté par-dessus le mur, prétendant aller à Sion ; mais ils se sont perdus peu après, car ils n’ont pas voulu m’écouter. J’ai aussi trouvé très pénible l’ascension du défilé, et encore plus terrible le passage entre les gueules des lions. Si ce n’avait été le portier qui m’a encouragé par ses paroles, j’aurais peut-être fait demi-tour. Mais grâce à Dieu, me voici heureusement ici, et je vous remercie pour la belle hospitalité que vous m’offrez. Prudence, prenant alors la parole, lui demanda :

Prudence – Ne penses-tu pas parfois au pays que tu as quitté ?

Chrétien – Oui, madame, quoique avec beaucoup de répugnance et de honte. Si je l’avais désiré, j’aurais pu retourner en arrière, car j’ai eu suffisamment de temps et d’occasions ; mais j’aspire à une meilleure patrie, la céleste (Hébreux 11.15-16).

Prudence – N’as-tu pas emporté avec toi certaines choses auxquelles tu étais attaché avant de partir ?

Chrétien – Si, madame, mais bien malgré moi, surtout mes pensées charnelles, qui me plaisaient tant, ainsi qu’à mes compatriotes. À présent, toutefois, toutes ces choses me pèsent tellement que, si cela ne dépendait que de moi, je n’y penserais jamais plus. Pourtant, plus je veux faire le bien, plus je pratique le mal (Romains 7.15-21).

Prudence – Et n’as-tu pas parfois l’impression que les choses qui autrefois t’embarrassaient sont presque sur le point de te vaincre ?

Chrétien – Cela m’arrive, mais rarement ; cependant, lorsque cela se produit, ces heures me semblent précieuses comme de l’or.

Prudence – Et te souviens-tu des moyens par lesquels tu surmontes ces maux dans de telles occasions ?

Chrétien – M’en souvenir ? Oui ! Quand je médite sur ce que j’ai vu, et sur ce qui s’est passé près de la Croix ; quand je contemple ce vêtement brodé ; quand je me réjouis en regardant ce parchemin, et lorsque je pense à ce qui m’attend si j’ai le bonheur d’atteindre le lieu où je me rends, alors il me semble que tous ces maux qui m’affligent disparaissent.

Prudence – Et pourquoi désires-tu tant arriver au mont Sion ?

Chrétien – Oh ! parce que j’espère y trouver vivant Celui que j’ai vu récemment cloué à la croix ; j’espère, en arrivant là-bas, être libéré de ce qui m’oppresse tant, car la mort n’y entre pas, et j’y aurai la compagnie qui me plaît le plus (Ésaïe 25.8 ; Apocalypse 21.3-4). J’aime beaucoup Celui qui, par sa mort, m’a délivré du fardeau qui m’accablait. Mes infirmités intérieures m’ont beaucoup affligé. Je désire atteindre le pays où il n’y aura plus de mort, et je soupire après des compagnons semblables à ceux qui chantent sans cesse : Saint, Saint, Saint ! Charité prit alors la parole :

Charité – As-tu une famille ? Es-tu marié ?

Chrétien – J’ai une femme et quatre enfants.

Charité – Alors, pourquoi ne les as-tu pas amenés avec toi ?

Chrétien – (En pleurant.) Je les aurais emmenés avec la meilleure volonté ; mais, hélas, tous les cinq s’opposaient à mon voyage, et ils y résistèrent de toutes leurs forces.

Charité – Mais tu aurais dû leur parler et t’efforcer de les convaincre du danger qu’ils couraient.

Chrétien – Je l’ai fait, leur exposant aussi ce que Dieu m’avait révélé au sujet de la ruine de notre ville. Mais ils me prirent pour un fou et ne voulurent pas m’écouter (Genèse 19.14) ; j’ai accompagné ce conseil d’une prière fervente au Seigneur, car j’aimais beaucoup ma femme et mes enfants.

Charité – Je suppose que tu leur as parlé avec insistance de ta douleur et de la peur que tu avais de la destruction, car je crois que tu voyais clairement à quel point ta ruine était imminente.

Chrétien – En vérité, je l’ai fait, non une fois, mais plusieurs fois ; et de plus, ma crainte était bien visible sur mon visage, dans mes larmes et dans la peur que m’inspirait l’idée du jugement suspendu au-dessus de nos têtes. Mais rien n’a pu les persuader de me suivre.

Charité – Et quelles raisons ont-ils données pour ne pas te suivre ?

Chrétien – Ma femme craignait de perdre ce monde, et mes enfants étaient entièrement livrés aux plaisirs de la jeunesse ; voilà pourquoi ils m’ont laissé entreprendre seul mon voyage.

Charité – Et n’est-ce pas toi qui, par ta vie vaine, rendais vains les conseils que tu leur donnais pour qu’ils te suivent ?

Chrétien – Il est vrai que je ne peux rien dire en faveur de ma vie, car je sais combien elle a été imparfaite, et je sais aussi qu’un homme peut contredire par sa conduite ce qu’il cherche à persuader aux autres par ses paroles, pour leur bien. Mais je puis affirmer que j’évitais soigneusement de leur donner occasion, par quelque action inconvenante, de refuser de m’accompagner dans mon pèlerinage ; si bien qu’ils m’accusaient d’exagérer et de me priver, à cause d’eux, de choses qui, selon eux, n’avaient rien de mal ; et je peux encore ajouter que ce qu’ils voyaient en moi, c’était ma grande préoccupation de ne pas pécher contre Dieu et de ne pas nuire à mon prochain.

Charité – Il est certain que Caïn haït son frère (1 Jean 3.12), parce que les œuvres d’Abel étaient bonnes, et les siennes mauvaises ; et c’est la raison pour laquelle ta femme et tes enfants se sont détournés de toi ; par cette conduite, ils se sont montrés implacables envers le bien, et tu as délivré ton âme de leur sang (Ézéchiel 3.19).


Appréciez davantage : 

Hymne 439 « Le Salut de la Famille »

Le Pèlerin, semaine 2, vendredi, chapitre 8

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 8

SEMAINE 2 - VENDREDI

Lire et prier : « Mon Dieu a envoyé son ange et a fermé la bouche des lions, afin qu’ils ne me fassent aucun mal, parce que j’ai été trouvé innocent devant lui ; et même devant toi, ô roi, je n’ai commis aucun crime. » (Dn 6:22)


Chrétien passe indemne entre les lions,
et arrive au Palais Beau, où il est accueilli 
affectueusement et traité avec la plus grande attention et tendresse.

JE VIS, dans mon rêve, qu’en apercevant le palais, Chrétien accéléra le pas, dans l’espoir d’y trouver un abri. Mais avant d’y parvenir, il trouva un passage très étroit, à une centaine de pas du palais, et vit, de chaque côté de la route, un lion terrible. Voilà le danger, se dit Chrétien à lui-même, qui força Timoré et Méfiance à faire demi-tour. (Les lions étaient attachés par de grosses chaînes, mais Chrétien ne s’en aperçut pas). Et moi aussi, je dois rebrousser chemin, car je vois que seule la mort m’attend ici. Mais le portier du palais, qui s’appelait Vigilant, ayant perçu l’indécision de Chrétien, lui cria :

— As-tu si peu de foi ? (Marc 4:40). Ne crains pas les lions, car ils sont enchaînés, et ils sont là uniquement pour éprouver la foi ou l’incrédulité ; passe au milieu du chemin, et aucun mal ne t’arrivera.

Chrétien décida alors de passer. Bien qu’il tremblât de peur, il suivit fidèlement les instructions de Vigilant, et, bien qu’il entendît les rugissements des deux bêtes féroces, il ne reçut aucun mal d’elles. Il battit des mains de joie et, en quatre bonds, atteignit la porte du palais, et interrogea ainsi Vigilant.

Chrétien — À qui appartient ce palais ? Me permettra-t-on d’y passer la nuit ?

Vigilant — Ce palais appartient au Seigneur du Défilé, et il a été construit expressément pour servir de repos et d’asile aux voyageurs. Et toi, d’où viens-tu et où vas-tu ?

Chrétien — Je viens de la ville de la Destruction et je me dirige vers la montagne de Sion ; j’ai été surpris par la nuit et je souhaiterais la passer ici, s’il n’y a pas d’inconvénient.

Vigilant — Comment t’appelles-tu ?

Chrétien — Je m’appelle maintenant Chrétien ; autrefois je m’appelais Privé-de-la-Grâce. Je suis de la lignée de Japhet, à laquelle Dieu a persuadé d’habiter dans les tentes de Sem (Genèse 9:27).

Vigilant — Tu arrives bien tard. Il y a longtemps que le soleil s’est couché.

Chrétien — Il m’est arrivé de grands malheurs. Tout d’abord, je me suis laissé vaincre par le sommeil au lieu de repos, sur la pente du défilé. Malgré cela, j’aurais pu arriver ici plus tôt si, pendant que je dormais, je n’avais pas laissé tomber de mes mains mon diplôme, dont je ne me suis aperçu de la perte qu’une fois arrivé au sommet de la montagne. J’ai dû faire demi-tour, et je rends grâce à Dieu d’avoir pu retrouver ce précieux document. Voilà les causes de mon retard.

Vigilant — Bien. Maintenant je vais appeler l’une des vierges qui habitent le palais, afin qu’elle te parle et te présente au reste de la famille, selon la coutume de la maison, si ta conversation lui est agréable.

Il fit sonner une clochette, au son de laquelle apparut une jeune fille, grave et belle, nommée Discrétion, qui demanda pourquoi on l’appelait.

Vigilant — Cet homme est un voyageur qui, venant de la ville de la Destruction, se rend à la montagne de Sion. La nuit l’a surpris en chemin, et il est très fatigué ; il aimerait savoir s’il peut être hébergé ici cette nuit. Discrétion l’interrogea sur son voyage et les événements qui s’y étaient produits, et comme elle reçut des réponses satisfaisantes à tout ce qu’elle voulait savoir, elle lui demanda :

Discrétion — Dites-moi votre nom.

Chrétien — Je m’appelle Chrétien. Et comme on m’a dit que ce bâtiment a été construit expressément pour la sécurité et l’abri des voyageurs, je souhaiterais que vous me permettiez d’y passer la nuit.

Discrétion sourit, tandis que quelques larmes coulaient sur ses joues, et ajouta : Laissez-moi appeler quelques personnes de ma famille. Et elle appela Prudence, Piété et Charité, qui, après avoir parlé avec lui un moment, le firent entrer dans le palais.

Beaucoup des habitants sortirent pour accueillir Chrétien, chantant : Entre, béni du Seigneur ; c’est pour des voyageurs comme toi que ce palais a été édifié. Chrétien leur fit une révérence, et les suivit à l’intérieur de la maison. Il s’assit, et on lui servit un léger repas, en attendant que le souper soit prêt. Et, pour profiter du temps, ils entamèrent le dialogue suivant :

Piété — Cher Chrétien, tu as vu l’affection et la bienveillance avec lesquelles nous t’avons accueilli ; raconte-nous donc, pour notre édification, quelques aventures de ton voyage.

Chrétien — Avec grand plaisir. Et je suis heureux de vous voir si bien disposés envers moi.

Piété — Dis-moi quelle fut la cause qui t’a poussé à entreprendre ce pèlerinage.

Chrétien — Ce qui m’a obligé à quitter ma patrie, c’est une voix terrible qui criait continuellement à mes oreilles : Si tu ne sors pas d’ici, tu périras infailliblement.

Piété — Pourquoi as-tu choisi ce chemin ?

Chrétien — Parce que Dieu l’a voulu ainsi. Je tremblais et pleurais, sans savoir où fuir, lorsqu’un homme nommé Évangéliste vint à ma rencontre, me dirigea vers la porte étroite, que je n’aurais jamais trouvée seul, et m’indiqua la route qui m’a conduit directement à ce lieu.

Piété — Et es-tu passé par la maison de l’Interprète ?

Chrétien — Oui, et aussi longtemps que je vivrai je n’oublierai jamais les choses que j’y ai apprises, principalement trois :

1. Comment Christ conserve dans le cœur l’œuvre de la grâce, malgré les efforts de Satan ;

2. Comment l’homme, à cause de l’excès de ses péchés, en vient à désespérer de la miséricorde de Dieu;

3. La vision de celui qui, en songe, assistait au jugement universel.


Piété — As-tu entendu raconter ce songe ?

Chrétien — Oui, et il était vraiment terrible. Mais je suis heureux maintenant de l’avoir entendu.

Piété — Et n’as-tu rien vu d’autre dans la maison de l’Interprète ?

Chrétien — J’ai vu un magnifique palais, dont les habitants étaient vêtus d’or. À l’entrée du palais, j’ai vu un homme courageux qui, se frayant un chemin au milieu des gens armés qui s’opposaient à lui, parvint à entrer, tandis qu’il entendait les voix des habitants qui l’encourageaient à conquérir la gloire éternelle. J’aurais volontiers passé une année entière dans cette maison, mais j’avais encore beaucoup de chemin à faire, et je suis donc parti et j’ai poursuivi ma route.

Piété — Et ensuite, que vis-tu ?

Chrétien — J’avais à peine marché un peu, que je vis un homme cloué sur une croix, tout couvert de blessures et de sang. En le voyant, un fardeau très encombrant tomba de mes épaules, sous lequel je gémissais. Ce fut pour moi une grande surprise, car je n’avais jamais vu rien de tel. Et tandis que, émerveillé, je le regardais, trois personnages resplendissants s’approchèrent de moi ; l’un me dit que mes péchés étaient pardonnés ; un autre me retira les haillons qui me couvraient, et me donna ce splendide vêtement que tu vois ; et enfin, le troisième me scella le front et me donna ce diplôme.


Appréciez davantage :

Hymne 416 « Guerre Spirituelle – Pour Dieu comme Forteresse »

https://hinario.org/detail.php?id=965


mardi 24 juin 2025

Le Pèlerin, semaine 2, jeudi, chapitre 7

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 7

SEMAINE 2 - JEUDI

Lire et prier : « C’est pourquoi il est dit : Réveille-toi, toi qui dors, relève-toi d’entre les morts, et Christ t’éclairera. » (Éphésiens 5:14)


Les autres voyageurs arrivèrent également au début du défilé, mais lorsqu’ils virent ces rochers et précipices, et remarquèrent qu’il y avait deux autres chemins beaucoup plus faciles, qui menaient probablement au même endroit que celui qu’empruntait Chrétien, ils décidèrent chacun de prendre leur propre voie.

Ainsi, l’un prit le chemin du Danger et s’enfonça dans une forêt sombre ; l’autre suivit le chemin de la Mort Éternelle, qui le conduisit dans une vaste plaine pleine de montagnes noires, où il trébucha et tomba pour ne plus jamais se relever.

Je tournai alors mes regards vers Chrétien, pour le contempler dans son ascension périlleuse.

Quel labeur ! Quelle fatigue ! Il ne pouvait courir, et parfois même marcher lui était difficile, devant s’aider de ses mains. Heureusement, à mi-hauteur, se trouvait un lieu de repos, préparé par le Seigneur du chemin pour le réconfort des voyageurs fatigués. Parvenu là, Chrétien s’assit pour se reposer.

Il sortit de sa poche son diplôme, pour se réjouir et se consoler en le lisant, et pour examiner le vêtement qu’on lui avait donné au pied de la croix. Mais, tandis qu’il se reposait, il s’endormit, et pendant son sommeil, le diplôme lui glissa des mains. Il ne se réveilla qu’au crépuscule. Alors qu’il dormait encore, quelqu’un s’approcha de lui et lui dit : « Va vers la fourmi, paresseux, considère ses voies et deviens sage » (Proverbes 6:6). À cette exhortation, il se réveilla et se leva immédiatement, poursuivant sa marche avec plus de hâte, jusqu’à atteindre le sommet de la montagne.

Alors qu’il approchait, deux hommes, Timoré¹ et Méfiance, vinrent à sa rencontre en courant dans le sens inverse. — Pourquoi revenez-vous en arrière ? leur demanda Chrétien.

Timoré — Nous nous rendions à la cité de Sion, ayant déjà surmonté les difficultés de ce défilé ; mais à mesure que nous avancions, les obstacles devenaient plus grands, au point qu’il nous a semblé plus prudent de revenir sur nos pas et d’abandonner notre entreprise.

Méfiance — C’est la stricte vérité. Un peu plus loin, nous avons vu deux lions sur le chemin ; qu’ils dormissent ou non, nous ne le savons pas, mais nous avons eu peur de nous en approcher, car ils pourraient nous mettre en pièces.

Chrétien — Vos paroles me font peur ; mais vers où pourrais-je fuir en toute sécurité ? Si je retourne dans mon pays, ma ruine est certaine, car cette terre est condamnée au feu et au soufre ; mais si j’atteins la Cité Céleste, je serai en sécurité pour toujours. Allons donc, ayons confiance ! Reculer, c’est courir à une mort certaine ; avancer, c’est seulement craindre la mort, mais avec la vie éternelle en perspective. Allons donc !

Et il continua son chemin, tandis que Timoré et Méfiance redescendaient la montagne.

Cependant, les paroles de ces deux hommes le troublaient, et, pour se rassurer et se consoler, il chercha son diplôme sur sa poitrine, mais ne le trouva pas ! Grande fut son angoisse et sa confusion de ne pas retrouver ce diplôme qui le consolait tant et qui était son laissez-passer pour entrer dans la Cité Céleste.

Il se souvint alors s’être endormi en chemin et, tombant à genoux, demanda pardon au Seigneur, puis revint sur ses pas pour chercher le document qu’il avait perdu. Pauvre Chrétien ! Qui pourrait exprimer l’amertume de son âme ? Il soupirait, versait des larmes abondantes, et se reprochait amèrement de s’être laissé vaincre par le sommeil dans un lieu destiné uniquement au repos temporaire des voyageurs.

Il scrutait attentivement chaque côté du chemin, à la recherche de son diplôme, et arriva ainsi à l’endroit où il s’était endormi. Là, sa douleur devint plus vive encore, et la blessure de son cœur s’aggrava en contemplant ce lieu qui lui rappelait un malheur si sensible (Apocalypse 2:4-5 ; 1 Thessaloniciens 5:6).

Il s’écria en ces termes : Misérable que je suis ! M’être endormi en plein jour ! Dormir au milieu de tant de dangers ! Céder ainsi à la chair et lui accorder du repos dans un lieu réservé au réconfort temporaire des pèlerins ! Ainsi en fut-il des Israélites qui, à cause de leurs péchés, furent contraints de rebrousser chemin vers la mer Rouge !

Malheureux que je suis ! Me voir obligé de revenir sur mes pas avec tant de peine, ce qui ne serait pas arrivé si je n’avais pas succombé à ce sommeil de péché. Combien serais-je avancé sur ma route à cette heure ! Me voilà obligé de parcourir trois fois un chemin que j’aurais dû faire une seule fois ; et, pire encore, je risque d’être surpris par la nuit, car le jour touche à sa fin ! Comme il m’aurait mieux valu résister au poids du sommeil !

Absorbé dans ces pensées, il arriva au lieu de repos. Il s’assit quelques instants, pour laisser libre cours à ses larmes, jusqu’à ce que, enfin, la Providence lui permit, en tournant les yeux autour du banc où il était assis, d’apercevoir son diplôme ; il le ramassa précipitamment et le remit contre sa poitrine.

Il m’est impossible de décrire la joie qui envahit cet homme en se voyant à nouveau en possession de ce précieux document, gage de sa vie et laissez-passer pour le port tant désiré. Il le serra contre son cœur, remercia Dieu de lui avoir permis de le retrouver, et, pleurant de joie, reprit sa marche, déjà souriant et léger, mais pas suffisamment pour que le coucher du soleil ne le surprenne avant d’atteindre le sommet de la montagne.

Funeste sommeil, disait Chrétien dans sa douleur, tu es la cause pour laquelle je dois désormais voyager de nuit. Le soleil ne m’éclaire plus. Mes pieds ne sauront plus où marcher, et mes oreilles n’entendront que les rugissements des bêtes nocturnes. Hélas ! C’est la nuit que les lions rencontrés par Timoré et Méfiance partent à la chasse. Si je les rencontre dans les ténèbres, qui me délivrera de leurs griffes ? (Apocalypse 3:2 ; 1 Thessaloniciens 5:7-8).

Tels étaient les pensées de Chrétien. Mais, levant les yeux, il aperçut un magnifique palais, situé juste en face du chemin, et appelé le Palais Beau.


____________________

¹ qui a de la crainte ; qui a peur de se tromper ; craintif, timide. Quelqu’un qui se montre hésitant, réservé.


Appréciez davantage :

Hymne 90 « Sa Valeur »

https://hinario.org/detail.php?id=240

Le Pèlerin, semaine 2, mercredi, chapitre 7

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 7

SEMAINE 2 – MERCREDI

Lire et prier : « Néanmoins, sachant que l’homme n’est pas justifié par les œuvres de la loi, mais seulement par la foi en Jésus-Christ, nous aussi, nous avons cru en Jésus-Christ, afin d’être justifiés par la foi en Christ et non par les œuvres de la loi, parce que personne ne sera justifié par les œuvres de la loi. » (Galates 2:16)


Chrétien rencontre Simple, Paresse et Présomption
plongés dans un profond sommeil ; il est méprisé par Formaliste
et par Hypocrisie ; il gravit le Défilé de la Difficile ; perd le diplôme et le retrouve.

CETTE scène terminée, Chrétien poursuivit sa route et, en descendant la pente de la colline au sommet de laquelle avaient eu lieu les événements que je viens de rapporter, il aperçut, à quelque distance du chemin, trois individus nommés Simple, Paresse et Présomption, plongés dans un profond sommeil, les pieds liés par des chaînes de fer.

Il s’adressa à eux pour les réveiller et leur cria : Réveillez-vous, vous êtes comme ceux qui dorment au sommet d’un mât (Proverbes 23:34), avec la mer Morte à leurs pieds, un abîme sans fond. Levez-vous et venez avec moi, je vous aiderai à vous libérer de ces chaînes, car si le lion rugissant passe par ici, vous tomberez sûrement entre ses griffes terribles (1 Pierre 5:8).

Tous trois se réveillèrent, regardèrent Chrétien, mais ne prêtèrent aucune attention à ses paroles. « Je ne vois aucun danger », dit Simple. « Laisse-moi dormir un peu », ajouta Paresse, et Présomption lui répondit de ne pas se mêler de sa vie et de laisser tranquille celui qui était en paix. Et ils continuèrent à dormir, laissant Chrétien poursuivre sa route.

Il continua à marcher, bien que triste et affligé de voir que ces hommes, en un si grand danger, refusaient avec tant d’obstination d’accepter l’offre généreuse qu’il leur avait faite, de les aider à se libérer de leurs chaînes, après les avoir réveillés de leur funeste sommeil et leur avoir donné de sages conseils.

Plongé dans ces pensées, Chrétien marchait lorsqu’il vit, à sa grande surprise, deux hommes sauter du mur qui bordait le chemin étroit et se diriger apparemment vers lui. Ils s’appelaient Formaliste et Hypocrisie. Une fois arrivés près de Chrétien, le dialogue suivant s’engagea entre eux :

Chrétien – D’où venez-vous, messieurs, et où allez-vous ?

Formaliste et Hypocrisie – Nous sommes originaires de la terre de Vaine Gloire, et nous allons au mont Sion à la recherche de louanges.

Chrétien – Mais pourquoi n’êtes-vous pas entrés par la porte située au début du chemin ? Ignorez-vous qu’il est écrit : « Celui qui n’entre pas par la porte dans la bergerie, mais qui y monte par ailleurs, est un voleur et un brigand » ? (Jean 10:1)

Formaliste et Hypocrisie – Les gens de notre pays considèrent, à juste titre, qu’il faut faire un grand détour pour atteindre la porte, et ils savent qu’il est plus facile de sauter par-dessus le mur. Il est vrai qu’en agissant ainsi, ils transgressent la volonté révélée du Seigneur, mais cette habitude dure depuis plus de mille ans, et vous savez bien que l’habitude fait loi.

Il ne fait aucun doute que, si cette affaire était soumise à un tribunal, un juge impartial statuerait en notre faveur. D’ailleurs, il s’agit seulement d’entrer dans le chemin ; par où l’on entre importe peu. Vous êtes entré par la porte, nous avons sauté le mur ; mais en fin de compte, nous sommes tous sur le chemin, et nous ne voyons pas quelle est votre supériorité.

Chrétien – Je ne peux pas être d’accord avec vous. Moi, je suis la règle établie par le Maître, et vous vous laissez guider par vos caprices, étant considérés, à juste titre, par le Seigneur du chemin, comme des voleurs. Je suis convaincu qu’à la fin de votre voyage, vous ne serez pas reconnus comme des hommes de foi et de vérité. Vous êtes entrés sans l’accord du Seigneur, vous sortirez sans sa miséricorde.

Formaliste et Hypocrisie – Tout ce que vous dites peut être vrai, mais le mieux est que chacun s’occupe de ses affaires et laisse les autres tranquilles. Sachez que nous gardons les lois et les commandements aussi scrupuleusement que vous, et la seule différence entre nous, c’est ce vêtement que vous portez, probablement donné par quelqu’un pour couvrir la honte de votre nudité.

Chrétien – Vous vous trompez lourdement si vous pensez que les lois et les commandements peuvent vous sauver, alors que vous n’êtes pas entrés par la porte étroite (Galates 2:16). Ce vêtement, qui a attiré votre attention, m’a été donné par le Seigneur pour couvrir ma nudité, et je le considère comme une grande preuve de sa bonté, car auparavant je n’avais que des haillons.

Lorsque j’arriverai à la porte de la cité, Il me reconnaîtra comme digne d’y entrer, grâce à ce vêtement qu’Il m’a offert le jour où Il m’a purifié de ma misère. De plus, j’ai sur le front un signe, que vous n’avez peut-être pas encore remarqué, qui m’a été apposé par l’un des amis les plus proches du Seigneur, le jour où le fardeau qui m’oppressait tant est tombé de mes épaules.

J’ai aussi un diplôme scellé, qu’on m’a également donné, à la fois pour me consoler par sa lecture pendant le voyage, et pour me servir de présentation afin d’être admis dans la Cité Céleste. Je soupçonne que toutes ces choses vous manqueront, et vous ne les avez pas, parce que vous n’êtes pas entrés par la porte.

Ils ne répondirent pas à ces remarques de Chrétien ; ils se contentèrent de se regarder et de sourire. Après cela, tous les trois poursuivirent leur route. Chrétien allait devant, parlant à lui-même, tantôt triste, tantôt consolé et satisfait, lisant de temps en temps le diplôme qu’il avait reçu et qui lui donnait tant de force.

Ainsi ils arrivèrent au pied d’un défilé où se trouvait une source. En plus du chemin qui commençait à la porte, il y avait deux autres sentiers, appelés Danger et Mort Éternelle. Le chemin qui traversait le défilé s’appelait Difficile. Chrétien s’approcha de la source (Ésaïe 55:1), but et se rafraîchit.

Il commença ensuite à gravir le défilé par le chemin Difficile, en disant : Le chemin est raide et rugueux, mais il mène directement à la vie : il faut envidar¹ dans cette entreprise tous ses efforts et sa détermination. Courage, mon cœur, ne crains pas et ne chancelle pas ; mieux vaut suivre le vrai chemin, même s’il est difficile, que de prendre le plus facile, qui mène à la ruine éternelle !


________________________

¹ S’engager, appliquer


Appréciez davantage : 

Hymne 30 « ‘Abba, Père’, ici réunis »

https://hinario.org/detail.php?id=55


Le Pèlerin, semaine 2, mardi, chapitre 6

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN
VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 6

SEMAINE 2 - MARDI

Lire et prier : « Car vous avez été régénérés, non par une semence corruptible, mais par une semence incorruptible, par la parole vivante et permanente de Dieu. » (1 P 1.23)


Chrétien arrive à la Croix

Le fardeau tombe de ses épaules, il est justifié, 
et il reçoit un vêtement ainsi qu’un diplôme
d’adoption [filiation]¹ dans la famille de Dieu.

MON rêve continuait. Je vis Chrétien marcher sur un chemin bordé, des deux côtés, de murailles appelées salut (Ésaïe 26.1). Il avançait avec beaucoup de difficulté, à cause du fardeau qu’il portait sur le dos, mais son pas était rapide et assuré ; je le vis arriver à une petite colline, au sommet de laquelle se dressait une croix, et un peu plus bas, un sépulcre. Lorsqu’il arriva à la croix, le fardeau se détacha instantanément de ses épaules, roula jusqu’au sépulcre et y tomba, pour ne plus jamais en ressortir.

Quel soulagement et quelle joie pour Chrétien ! « Béni soit Celui qui, par ses souffrances, m’a donné le repos, et par sa mort m’a donné la vie ! » s’écria-t-il, et il demeura quelques instants en extase, émerveillé par le grand bienfait que la croix venait de lui accorder ; il regardait de tous côtés, rempli d’étonnement, jusqu’à ce que son cœur déborde en abondantes larmes (Zacharie 12.10).

Il pleurait, lorsque trois êtres resplendissants apparurent devant lui, le saluant : « Paix à toi. » Le premier lui dit : « Tes péchés te sont pardonnés. » (Marc 2.5) Le deuxième, après l’avoir dépouillé de ses vêtements sales, le revêtit d’un habit de fête (Zacharie 3.4), et le troisième lui apposa un sceau sur le front (Éphésiens 1.13), puis lui remit un diplôme scellé, sur lequel il devait méditer tout au long du chemin et qu’il remettrait à son arrivée à la Cité Céleste.

En voyant toutes ces choses, Chrétien fut rempli d’une grande joie, et continua son chemin en chantant à peu près ces paroles :

« J’ai toujours marché accablé sous le poids de mes péchés, sans trouver de soulagement à ma souffrance jusqu’à ce que j’arrive ici. Où suis-je donc ? Oh ! c’est ici, sans aucun doute, que commence mon bonheur, car c’est ici que les liens ont été rompus, ceux qui attachaient à mes épaules le fardeau qui m’oppressait. Je te salue, ô croix bénie ! Béni sois-tu, saint sépulcre ! Béni soit à jamais Celui qui a été enseveli en toi pour mes péchés. »


_______________________

¹ Il n’y a aucun fondement biblique pour croire que les chrétiens ont été adoptés par Dieu. Dieu ne nous a pas trouvés dans un orphelinat ; Il nous a engendrés en Christ. « Et parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, lequel crie : Abba, Père ! » (Galates 4.6)

« ‘Abba’ est un mot araméen qui signifie ‘père’. Après avoir été régénérés, nous ne sommes plus de simples créatures de Dieu ; nous sommes Ses enfants. Étant désormais nés de Dieu et unis à Lui par la vie, il est tout à fait normal et doux de L’appeler ‘Père’. » – Commentaire de Witness Lee, note 2 sur Romains 8.15 (Bible version Recouvrement)


Appréciez davantage :  

Hymne « Sa Justice »

https://hinario.org/detail.php?id=32

dimanche 22 juin 2025

Le Pèlerin, semaine 2, lundi, chapitre 5

LE PÈLERIN
LE VOYAGE DU CHRÉTIEN VERS LA CITÉ CÉLESTE

CHAPITRE 5

SEMAINE 2 – LUNDI

Lire et prier : « Depuis les jours de Jean-Baptiste jusqu’à présent, le royaume des cieux est forcé, et ce sont les violents qui s’en emparent. » (Matthieu 11:12)


Chrétien dans la maison de l’Interprète (2)

Ensuite, il mena Chrétien dans un lieu très agréable, où se dressait un superbe et somptueux palais, sur les créneaux¹ duquel se tenaient des personnes vêtues d’or ; à la porte, il vit une grande foule, désireuse d’entrer, à ce qu’il semblait, mais n’osant pas le faire.

Il vit aussi, non loin de la porte, un homme assis à une table, avec un livre et du matériel pour écrire, chargé de noter les noms de ceux qui entraient. De plus, il vit dans la cour de nombreux hommes armés gardant l’entrée, prêts à empêcher, coûte que coûte, l’accès à ceux qui voudraient entrer.

Toutes ces choses surprirent Chrétien, mais sa stupeur fut indescriptible lorsqu’il vit que, tandis que tous reculaient par peur des hommes armés, un seul, dont l’audace était peinte sur le visage, s’approcha de celui qui était assis à la table et lui dit : « Écris mon nom », puis, l’épée à la main et la tête protégée par un casque, il attaqua les gardes, et malgré la fureur avec laquelle ils le reçurent, il distribua avec un grand courage des coups et des estocades de tous côtés.

Son intrépidité était telle que, bien que blessé, ayant renversé plusieurs de ceux qui voulaient désespérément lui barrer la route (Matthieu 11:12 ; Actes 14:22), il se fraya un chemin parmi eux et entra dans le palais, sous les applaudissements généraux de ceux qui, depuis les créneaux¹, avaient assisté au combat et qui l’acclamaient en disant : « Entre, entre, et tu jouiras de la gloire éternelle » ; puis, le recevant avec une joie inexprimable, ils l’habillèrent de vêtements resplendissants semblables aux leurs.

— Je comprends parfaitement, dit Chrétien en souriant : permettez-moi maintenant de poursuivre mon chemin.

— Non, répondit l’Interprète ; j’ai encore quelques choses à te montrer.

Et lui prenant la main, il le conduisit dans une maison sombre où se trouvait un homme enfermé dans une cage.

Une profonde tristesse se lisait sur son visage ; ses yeux étaient fixés au sol, les mains croisées sur la poitrine, et ses longs soupirs et gémissements témoignaient de l’affliction qui le rongeait intérieurement. Qu’est-ce que cela ? s’écria Chrétien, rempli d’effroi. Qu’il te le dise lui-même, répliqua l’Interprète.

Chrétien — Qui es-tu ?

Prisonnier — Ah ! Il fut un temps où je professais être chrétien, je prospérais et j’étais satisfait de moi-même et aux yeux des autres (Luc 8:13). Je me croyais destiné à la cité céleste, et cette pensée me remplissait de joie. Mais maintenant, je suis une créature désespérée, enfermée dans cette cage de fer. Je voudrais sortir, et... Hélas ! je ne peux pas !

Chrétien — Mais comment en es-tu arrivé à une situation si misérable ?

Prisonnier — J’ai cessé de veiller et d’être sobre, j’ai lâché les rênes de mes passions, j’ai péché contre ce que la Parole et la bonté du Seigneur ordonnaient clairement et fermement ; j’ai attristé le Saint-Esprit, et il s’est retiré de moi ; j’ai invoqué le diable, et il a répondu à mon appel ; j’ai provoqué la colère de Dieu, et Dieu m’a abandonné ; mon cœur s’est endurci à tel point que je ne peux plus me repentir.

Chrétien — N’y a-t-il donc aucun remède, aucun espoir pour toi ? Devras-tu rester enfermé pour toujours dans cette cage désespérante ? Le Fils béni du Seigneur n’est-il pas infiniment miséricordieux ?

Prisonnier — Je n’ai plus d’espoir. En moi-même, j’ai de nouveau crucifié² le Fils de Dieu (Hébreux 6:6), j’ai haï sa personne (Luc 19:14), méprisé sa justice, profané son sang, outragé l’Esprit de la grâce (Hébreux 10:28-29), c’est pourquoi je me considère privé de tout espoir, et il ne me reste que les terribles menaces d’un jugement certain et assuré, et la perspective d’un feu ardent qui me dévorera. Voilà l’état où m’ont conduit les passions, les plaisirs et les intérêts mondains qui autrefois me procuraient joie et délices, mais qui maintenant me tourmentent et me rongent comme des vers de feu.

Chrétien — Mais ne peux-tu pas revenir à Dieu et te repentir ?

Prisonnier — Dieu m’a refusé le repentir³ ; je ne trouve plus dans sa Parole d’encouragement pour croire ; Dieu lui-même m’a enfermé dans cette prison, et aucune force humaine ne pourrait m’en arracher. Ô éternité ! Éternité ! Que puis-je espérer, sinon la misère qui m’attend pour l’éternité !

Interprète — Chrétien, n’oublie⁴ jamais le malheur de cet homme ; que ce souvenir te serve d’avertissement et de leçon.

Chrétien — Et quelle terrible leçon ! Que le Seigneur me permette de veiller et d’être sobre, afin que je ne sois jamais dans une telle misère. Mais, je le répète, n’est-il pas temps que je reprenne ma route ?

Interprète — Pas encore. J’ai encore une chose à te montrer. Et, accompagné de Chrétien, il entra dans une maison où un homme se levait du lit, et, à mesure qu’il s’habillait, il tremblait et frissonnait. L’Interprète ne voulut pas expliquer ce que signifiait cette scène, mais ordonna à ce personnage de l’expliquer lui-même.

L’homme parla en ces termes : Cette nuit, j’ai rêvé que d’effrayantes ténèbres obscurcissaient tout le ciel, tandis que les éclairs terrifiants et le grondement des tonnerres me jetaient dans une angoisse extrême. J’ai vu aussi d’épais nuages se heurter les uns contre les autres, poussés par une tempête impétueuse. J’ai vu un homme assis sur un nuage, accompagné de myriades d’êtres célestes, tous en feu. Il semblait que les cieux brûlaient comme une fournaise, et j’ai entendu la voix d’une terrible trompette disant : « Levez-vous, morts, et venez au jugement ! » Alors j’ai vu même les rochers se fendre et les sépulcres s’ouvrir, d’où sortaient les morts qu’ils contenaient, certains joyeux, les yeux levés vers le ciel, d’autres honteux, cherchant à se cacher sous les montagnes.

J’ai vu alors que l’homme sur la nuée ouvrait un grand livre et ordonnait à tous de s’approcher de lui, mais à une distance respectueuse, comme entre le juge et les accusés qu’il va juger, car un feu sortait de la nuée, empêchant quiconque de s’approcher (1 Corinthiens 15:1 ; 1 Thessaloniciens 4:16 ; Jude 14-15 ; Jean 5:28-29 ; Apocalypse 20:11-13 ; Ésaïe 26:21 ; Michée 7:16-17 ; Psaume 44:1-3 ; Malachie 3:2-3 ; Daniel 7:9-10). Et j’ai entendu l’homme de la nuée dire à ses serviteurs : « Séparez l’ivraie et la paille, et jetez tout dans le feu ardent » (Matthieu 3:12 ; 7:19 ; 12:30 ; 25:30 ; Malachie 4:1). Et aussitôt, juste à l’endroit où je me trouvais, s’ouvrit l’abîme, dont la gueule vomissait avec fracas d’horribles colonnes de feu et des braises ardentes.

Et l’homme parla encore, disant : « Rassemblez mon blé dans le grenier » (Luc 3:17), et je vis alors que beaucoup furent enlevés par les nuées, mais moi, je restai où j’étais (1 Thessaloniciens 4:16-17). Je cherchais un lieu où me cacher, mais je n’en trouvais pas, car le regard du juge était fixé sur moi ; alors je sentis mes péchés s’accumuler dans ma mémoire, et ma conscience m’accusait de tous côtés (Romains 2:15). Et je me réveillai.

Chrétien — Et pourquoi étais-tu si effrayé en voyant ces choses ?

— Parce que je pensais que le jour du jugement était arrivé, et que je n’étais pas prêt ; et plus encore, parce que j’ai vu les anges enlever beaucoup de gens, me laissant au bord de l’abîme, tandis que ma conscience me tourmentait, que le juge me fixait, et que son visage semblait rempli d’indignation.

Quand l’homme eut fini de parler, l’Interprète, s’adressant à Chrétien, qui flottait entre l’espoir et la crainte, lui dit : Grave ces choses dans ta mémoire, et **profitez davantage⁵** si elles te servent de stimulant pour ne pas reculer sur le chemin que tu vas suivre. Pars donc, et que le Consolateur t’accompagne, étant toujours ton guide jusqu’à la cité. Chrétien reprit sa route, et répétait **souvent⁶** en lui-même : De grandes et précieuses choses je viens de voir ; bien qu’effrayantes, elles ont pour moi une grande valeur. Je veux y réfléchir, car ce n’est pas en vain qu’elles m’ont été enseignées. Je suis très reconnaissant au bon Interprète, pour la bonté qu’il m’a témoignée.


______________________

¹ Créneaux – Chacun des parapets séparés régulièrement par des merlons au sommet des murs des forteresses et châteaux ; entailles en haut des murs ou des tours.

² Bien que l’illustration de l’homme enfermé dans la cage soit basée sur le texte d’Hébreux 6:1-8, ce passage biblique ne donne aucun fondement pour croire que les chrétiens peuvent perdre leur salut en Christ. Ce texte constitue un avertissement aux croyants hébreux, qui se laissaient persuader de retourner à leur ancienne religion juive, ce qui empêcherait l’avancement de l’œuvre de salut du Seigneur en eux. L’œuvre de salut d’une personne qui a déjà cru au Seigneur Jésus peut être retardée, mais jamais annulée, car elle est irréversible (Jean 10:28-29). Concernant ce sujet, le frère Witness Lee fait le commentaire suivant à propos d’Hébreux 8:3 : « Une fois sauvés, les croyants ne peuvent jamais être une véritable malédiction. Toutefois, s’ils ne progressent pas dans la production du Christ, mais s’attachent aux choses qui déplaisent à Dieu, ils sont proches de la malédiction qui consiste à subir la punition du traitement gouvernemental de Dieu. (Cela doit être considéré comme la discipline ou le châtiment mentionné en 12:7-8). Être proche de la malédiction est complètement différent de subir la perdition éternelle, qui est la véritable malédiction. »

³ Nous reconnaissons que Dieu peut endurcir le cœur des hommes (Exode 4:21 ; 7:3 ; Josué 11:20 ; 1 Samuel 2:25 ; Romains 11:7-8), au point qu’ils ne puissent plus se repentir. Mais si cela arrive à un chrétien, cela signifie qu’il sera rejeté pour régner avec Christ dans le siècle à venir (le millénium) avec les vainqueurs. Bien que les croyants ne soient pas perdus éternellement, ils peuvent subir une punition dispensatoire dans le millénium pour leurs fautes (Hébreux 10:28-29), ce que le Seigneur appelle dans le NT : « des pleurs et des grincements de dents » (Matthieu 8:12).

« N’oublie pas » – « Ne t’oublie jamais »

« Oxalá » – « Profitez davantage »

« Amiudadas vezes » – « Souvent » ou « à plusieurs reprises »


Appréciez davantage :

Hymne « Mystère »

https://hinario.org/detail.php?id=1153

Le Pèlerin, semaine 6, mercredi, chapitre 19

LE PÈLERIN LE VOYAGE DU CHRÉTIEN VERS LA CITÉ CÉLESTE CHAPITRE 19 SEMAINE 6 - MERCREDI Lire et prier : "Celui qui se tient à l'éca...